debt not paid (maycolm)

Retrouver son taudis a été un véritable casse-tête. Les souvenirs que j'en garde sont complètement fumeux, noyé dans l'alcool trop consommé c'soir-là. Pourtant, la maison des horreurs, ça se repère de loin, normalement. Alors voilà, je suis déjà remonté à bloc en tournant - enfin - dans ce lopin de terre en friche et que je reconnais la ruine démoniaque. Une clope fumante entre mes lèvres gercées, les sourcils froncés, mécontents, j'inspire d'un coup sec et expire d'un air plaintif. J'attrape entre deux doigts le mégot que je jette par la fenêtre dans un mouvement d'humeur. La caisse fait un bruit pas possible qui ferait sortir n'importe lequel de ses colocs toqués. J'crois que j'ai pas vraiment réfléchi aux risques que je prenais en me pointant ici. J'ai jamais vu à quoi ressemblait sa tribu mais chaque fois qu'elle m'en a parlé, ils avaient l'air de vrais tarés. Mais là, je suis vraiment pas d'humeur à réfléchir. De toute façon, le flic qui nous a arrêté, la blondasse et moi, m'a grillé tous mes neurones en me tabassant.

J'ai mis deux jours à décuver de cette rouste. Et j'ai encore l'arcade ouverte et un œil au beurre noir. Les bleus sur mes côtes sont peut-être camouflés derrière mon sweatshirt trop large, n'empêche que ça me fait mal à chaque inspiration. Alors ouais, le flic a fini par nous laisser filer, la blonde - j'crois c'était Barbara, ou Barbie - et moi, mais j'ai toujours pas décoléré. Parce que si j'en suis là, c'est parce que cette tarée de poupée gonflable m'est tombé dessus en beuglant que c'était sa caisse. J'commence à m'dire que c'est encore cette saletée d'irlandaise qui me l'a mise à l'envers. En plus de ça, la caisse elle arrête pas de planter, et j'mets dix minutes à la démarrer le matin. Franchement ouais. Même la vioque dans blanche neige, elle a au moins fait gaffe à ce que la pomme ait belle allure. Tiens blanche neige, voilà une pomme toute pourrie, vas-y mange, en plus de ça elle est empoisonnée. Sans doute que Blanche Neige aurait eu plus de clairvoyance que moi quand j'ai accepté de troquer des centaines de dollars de cachets contre un tas de tôle volé.

Alors voilà, j'ai vraiment pas de recul, et j'pense pas à son mec toxico, ni à sa copine mécano dont elle m'a parlé. J'pense simplement à aller demander des comptes à cette harpie qui s'est encore bien foutue de ma gueule. Et vu que j'ai pas son numéro de téléphone, j'me gare au pied du château hanté. Là, j'sais pas vraiment quoi faire. Je jette un œil sur la place passager. Y a Rex, remis sur ses quatre pattes, qui lève une oreille en sentant mon regard sur lui. Il était couché, se redresse rapidement assis, attendant mes ordres. Finalement, j'enfonce ma main sur le volant et klaxonne bien cinq fois, de plus en plus longtemps. Le doux - horrible - son de la bagnole est accompagné des aboiements euphoriques du clébard. Finalement je passe un bras et la tête par la fenêtre, pour regarder toutes les fenêtres à la recherche d'une silhouette familière. J'crois en apercevoir une devant l'une des fenêtres, espérant ne pas me tromper, j'me mets à gueuler : HEY ! HEY MEADBH, FAUT QU'ON PARLE ! Et je me remet à klaxonner sans m'arrêter jusqu'à ce que je vois la silhouette quitter la fenêtre. Là j'me m'enfonce de mauvaise humeur dans le fond du siège. J'expire à nouveau comme une adolescente en train de se faire engueuler par son paternel. Je rallume une cigarette et tire trois lattes pendant ce qui me semble durer trois heures, le temps que la porte d'entrée s'ouvre.

Bonne pioche, c'est bien l'emmerdeuse de première.

J'ouvre en grand la portière d'un coup de pied et fais quelques pas vers elle, Rex sur mes talons. Salut, ça va ? Que j'balance rapidement la voix qui dégouline d'énervement. Dis, une question, comme ça, quand tu m'as filé "ta" caisse, t'aurais pas oublié de m'dire un truc par hasard ? Je mime les guillemets avec ma main libre et tire une longue latte pour lui donner le temps de réfléchir. Genre, que c'est pas ta caisse, en fait ? J'hausse les sourcils, et ça fait mal parce que mon arcade est ensemble sensible, mais pas plus mal que de m'être fait enflé deux fois par la même garce mythomane.

Les fêtes de fin d’année approchaient et même si on n’avait jamais été cadeaux et guirlandes dans la famille Driscoll, toi tu adorais la période de Noël et les rues qui s’illuminaient de mille feux en cette période. Si tu l’avais pu, tu aurais d’ailleurs décoré avec plaisir la baraque, mais tu n’avais rien pour ça. Ni boules, ni étoiles, encore moins des guirlandes. Un sapin ? même pas en rêve. Alors à défaut de pouvoir faire entrer l’esprit de Noël dans la maison, tu décorais tes ongles avec application, vernissant ces derniers d’un beau vert sapin. Les dents pressées sur ta langue, tu t’appliquais à ajouter de jolis détails au cure-dent. Tu avais beau vivre des histoires terribles, tu n’en restais pas moins une gonzesse à part entière, de celles qui s’épilaient jusqu’au dernier poil et qui connaissaient la composition de leur shampoing. L’un comme l’autre, c’était totalement inutile puisque tu n’étais toujours pas passée à la casserole et bien qu’ils soient bourrés de sulfates, tu achetais quand même les shampoings de la supérette. Voilà, tes compétences féminines étaient donc complètement inutiles.
La tête penchée, tu réalisais donc de véritables œuvres d’art sur le bout de ton index quand un abruti se mit à klaxonner comme un dingue dehors. Honnêtement, tu n’avais pas envie d’aller regarder par la fenêtre parce que dans tous les cas, ça sentait la merde cette histoire. Et puis, en général les histoires ne te concernaient pas. Sans doute qu’il s’agissait de ce con de roumain revenu s’en prendre à JJ, mais là encore tu n’avais aucun intérêt à te manifester. Un chient se mit également à beugler et tu roulais des yeux. « Oh la la, mais vos gueules les blaireaux » soufflais-tu pour toi-même en tendant le cou pour essayer de voir par la fenêtre. En vain, alors tu te penchais à nouveau sur ton travail. C’est là que l’abruti se mit à gueuler et cette fois, c’est ton nom qui fut articulé te faisant relever le nez, les sourcils arqués de surprise. Ce n’était pas courant qu’on vienne te chercher, encore moins en t’appelant par ton vrai prénom.
Te levant cette fois de ton poste de travail pour regarder par la fenêtre, tu soufflais sur l’ongle en même temps. Et dehors, le mec de la dernière fois t’attend. Celui que tu avais tasé et…et quoi d’autres au juste ? Tu avais vaguement le souvenir d’être revenue à la maison avec lui, mais le reste était flou dans ton esprit, mais il te semblait te revoir lui filer les clés de la voiture, d’ailleurs il l’avait toujours, c’est qu’elle devait lui plaire. Alors pourquoi hurler comme un fou ? Tu roulais des yeux avant de considérer ta veste en jean fourré. Tu avais moyennement envie de ruiner ton ongle en l’enfilant, alors tu continuais à souffler dessus, attrapant la veste de ton autre main.
Un jour, on devrait t’apprendre à te méfier. Genre, un cours de survie, quoi.
Mais non, tu marchais vers lui tranquillement tout en soufflant sur ton ongle, l’agitant par moment. Tu ne relevais les yeux sur Malcolm qu’au dernier moment. « Salut » Il parlait vite, t’avais comme l’impression qu’il n’était pas content parce qu’il ne te laissa même pas le temps de lui signifier qu’il tombait assez mal. Non, il en avait gros sur la patate et il enchaînait très vite tandis que tu le regardais d’un air torve de tes grands yeux bleus. D’ailleurs, il n’a pas l’air en forme avec sa tête défoncée de partout. Puis enfin, tu comprends le souci. « Ah » Tu fais, pas plus perturbée que ça. Tu finis néanmoins par hocher du menton pour lui signifier que c’est vrai. « Ben si elle est à nous, qu’est-ce que tu racontes ! C’est Popescu qui nous l’a laissée après qu’on se soit fritté. D’habitude il est plus coriace, s’il voulait la récupérer il serait revenu. Donc c’est bien qu’il était d’accord pour nous la laisser. » tu marquais une pause pour souffler sur l’ongle à nouveau. « Mais maintenant que tu le dis, il a dû la voler à la base donc ça j’y peux rien. » ça lui ressemblait bien ! Tous des voleurs ces roumains !
Tu relevais alors le nez sur lui, une moue peinée sur le bout des lèvres avant de lui désigner son visage. « C’est lui qui t’a fait ça ? » puis d’un haussement d’épaule « Si tu l’as toujours, c’est que t’as gagné alors, j’suis super fière de toi, t’es un bon ! »

C’est aussi cliché que ça semble dans les films, et ça vous fait vraiment sentir que vous êtes une sous-merde qui n’intéresse personne. Je veux dire, le coup de souffler avec condescendance sur ses ongles pendant que vous êtes en train de parler. C’est peut-être aussi parce que je suis du genre à exagérer les choses, j’en sais rien. Quoi qu’il en soit elle débarque avec sa dégaine naturelle, comme si j’étais pas en train de m’introduire chez elle pour régler nos comptes à bord du vieux tacot qu’elle m’a légué en guise de - ouvrez dix putains de guillemets - bonne foi. Salut. Qu’elle me répond simplement et ça me coupe la chique une seconde et je la regarde avec un air vexé comme pas possible avant d’expirer bruyamment comme un gamin et de me remettre à parler, ou plutôt à demander des explications sur le tas de tôle qu’elle a volé à une espèce d’escorte à qui on aurait injecté le virus de la rage. Et tout ce qu’elle trouve à dire, là, alors que je suis vraiment à deux doigts de la crise de nerfs - principalement à cause de la bavure policière dont j’ai été victime À CAUSE D’ELLE - c’est Ah. J’hausse les sourcils d’un air outré avant de lâcher un petit rire ahuri. AH ? Que je répète, passablement énervé. Elle devrait, au moins avoir l’air emmerdée. Mais non, pas du tout. Attends, ‘tends, ‘tends là ! Laisse moi récapituler deux secondes. Pour me dédommager des centaines de dollars que tu m’as tiré en me tasant la tronche, tu me files une voiture qui non seulement est pourrie sa race, mais en plus de ça, volée à - Mais elle ne me laisse même pas finir, non, ça serait clairement trop lui demander. Elle se contente de me couper honteusement la parole pour m’expliquer enfin, ce qui se rapproche le plus d’explications venant de sa bouche. Ben si elle est à nous, qu’est-ce que tu racontes ! C’est Popescu qui nous l’a laissée après qu’on se soit fritté. D’habitude il est plus coriace, s’il voulait la récupérer il serait revenu. Donc c’est bien qu’il était d’accord pour nous la laisser. Je cligne plusieurs fois des yeux. Me mord les lèvres complètement au bord du craquage et la regarde avec des grands yeux. Putain, j’vais me la faire. Et clairement pas dans le bon sens du terme. Non, j’vais lui casser la gueule. Franchement, ça sera même pas un truc de salopard qui tape sur des gonzesses, déjà parce que je suis même pas sûre de pouvoir la maîtriser. Je veux dire voyons les choses en face, vu comment cette fille m’a roulé à chaque fois, elle a sûrement aussi un diplôme de jujitsu, ça serait bien ma veine. Bref, pour en revenir à la situation je finis par secouer la tête agacé et marmonne : C’est quoi ça, popozékou ? Une marque de couches, ou un groupe de K-pop ? J’en sais foutre rien de ce que c’est et de pourquoi elle me parle d’un gars avec un nom bizarre. Ça semble être le propriétaire de ma caisse. Oh, well, alors sauf sur la blondasse est en réalité un dude avec un nom à chier, ce qui ne me semblait pas être le cas, alors Meadbh se fout encore de moi. Dans un geste d’énervement, je sors un paquet de cigarette pendant qu’elle ajoute : Mais maintenant que tu le dis, il a dû la voler à la base donc ça j’y peux rien. Ricanement bref et cynique. Ouais, c’est ce qui me semblait quand y a une espèce de folle dingue de Princesse Barbie qui s’est mise à m’embrouiller et taper sur la bagnole en hurlant que c’était la sienne.

Mais elle reste sur son histoire de Pope-truc et de je me suis battu pour la caisse, et ok, elle me fait le premier compliment depuis le début de notre rencontre - et aussi le premier compliment que j’entends depuis un sacré paquet de temps, et ok ça fait un peu plaisir. Mais j’ai trop perdu patience pour encore perdre du temps à m’engager dans ses délires. C’est facile de s’y laisser prendre parce qu’elle te sort les choses avec tellement de naturel que ça semble normal. Et puis elle est là “hey viens je te file une bagnole” ou “hey, t’inquiètes, elle marche du feu de dieu y a Dédé qui l’a réparé” et toi t’es là boire ses paroles parce qu’elle a cette assurance naïve dans la voix. C’est vrai quoi, pourquoi elle se ficherait de toi ? Elle a vraisemblablement douze ans et demi. Mais tu clignes des yeux et tu te prends un coup de taser dans le cou ! Putain de fille perfide. Je me sors une clope et la coince entre mes lèvres. Non, c’est pas Popotruc qui m’a pété la gueule, c’est un putain de flic qui m’a arrêté parce que la blonde là, comme j’te disais, a voulu me détruire en pleine rue, alors que j’étais vraiment déjà pas de bon poil, et qu’on s’est embrouillés. Et vu que les flics sont tous des tordus dans cette putain de ville, bah voilà. Et j’ai aussi passé deux putains d’heures menottées dans une ruelle avant d’me faire cogner. Tout ça parce que ta caisse appartient à une grosse tarée de cette même ville. Je reprends mon souffle et tire sur la cigarette et commence à faire les cent pas. Mais je ne m’arrête pas longtemps, je me rapproche d’elle à nouveau en levant un doigt en l’air. Oh mais maintenant tu me dis que non seulement elle appartient à cette folle de blondasse, mais aussi à un mec qui porte un nom de merde sans doute issu d’une putain de mafia russe ou j’sais pas quelle connerie où ils ont tous des noms de merde. So, merci pour l’avertissement, non vraiment ! Je m’arrête à nouveau et expire un nuage de fumée. Là enfin je prends le temps de réfléchir un petit peu et me reposte vers la voiture pour m’y poser contre. Je plante mes yeux dans le sol, gamin boudeur, et commence à creuser un sillon avec le bout de ma basket dans la terre. Je suis clairement saoulé, et vexé. Alors je marmonne d’une petite voix : Donc hein, t’as plutôt intérêt à me sortir une bonne idée pour me dédommager, parce que là franchement, ton cadeau il était pourri. Freud disait quoi déjà, sur la définition de la folie ?

Ce qui était drôle avec le dealer, c’est que tu ne te sentais même pas obligée de jouer à un rôle. Honnêtement, tu te comportais avec lui comme tu te comporterais si tu étais seule au monde, sans personne pour te regarder de haut ou te juger, personne non plus pour t’impressionner. Parce que c’était bien ça le souci, il ne t’impressionnait pas. Parce que tu n’avais plus la main cassée et que ça faisait longtemps qu’on ne t’avait plus cassé la gueule non plus. Et puis même, tu t’en étais sortie deux fois sans casses, t’en avais conclus qu’à part rouspéter, il n’allait pas te faire la tête au carré.
C’est donc sans méfiance que tu le saluais en soufflant sur tes ongles. Et franchement, tu te fis violence pour ne pas lui montrer le résultat final, parce que toi tu kiffais trop le résultat et il n’y avait jamais personne pour te féliciter ou te complimenter. Même Athéna ne les remarquerait même pas si tu lui mettais les mains sous le nez. Même en agitant les ongles. Sad life. De toute manière, Il s’en foutait bien parce qu’il était venu râler à propos de la voiture. Tu finis par relever tes yeux bleus sur lui et l’écouter. Ce qu’il avait à dire n’était d’ailleurs pas super intéressant, tu n’aimais pas trop qu’il te mette tes erreurs sous le nez. « Je t’ai déjà dit que j’étais désolée de t’avoir tasé ! » soufflais-tu en roulant des yeux. C’est vrai ça, il lui fallait quoi pour qu’il comprenne que tu ne recommencerais plus, pas sur lui du moins ? Tu n’avais pas eu le choix, et tu lui avais déjà expliqué que s’il avait été plus sympa, tu n’aurais pas fait ça. Enfin, peut-être pas, tu ne savais plus trop et puis, le passé appartenait au passé. Ouvrant les bras, tu sifflais « Mais Malcolm ! Je t’ai volé ta came, pas un rein ! Tu t’attendais à quoi ? Une Bentley ? » Mince quoi, c’était quelques centaines de dollars, pas des mille et des cents ! Tu continuais néanmoins tes explications histoire qu’il comprenne une bonne fois pour toute que non, tu ne l’avais pas juste volée. Tu avais des circonstances qui faisaient que cette voiture vous appartenait et le pire, c’est que tu y croyais vraiment à cette histoire parce que Seven, tu le connaissais maintenant. Tu savais qu’il ne renonçait pas juste comme ça, il ne lâchait pas le morceau sans se battre et à tes yeux, ce jour-là, le score avait été en ta faveur. Ceci dit, peut-être que le fait que Sam vide le chargeur dans sa direction l’avait aidé à prendre cette décision. Est-ce que ça avait été suffisant pour le dissuader de revenir ? Tu n’en étais pas sure, rien n’effrayait le roumain et s’il avait voulu la récupérer, il l’aurait fait, pour ça tu étais prête à mettre ta main au feu !
Alors pourquoi est-ce que Malcolm ne te croyait pas ? Tu étais de super bonne foi ! Pas juste de bonne foi, non. Super bonne foi. Parce que si tu l’avais voulu, il aurait pu ne rien avoir du tout ! Cette voiture, tu lui avais donné pour te faire pardonner, si tu avais su qu’il réclamerait un SAV de qualité, tu te serais contentée de rentrer pour ne plus jamais ressortir et surtout pas avec les clés ! Au lieu de réaliser tout ça, Malcolm t’engueulait encore et encore ! La manière dont il écorcha le nom t’arracha pourtant un rire. Rire physiologique. « Laisse, c’est un connard » ricanais-tu sauf que ce n’était pas le propos, hein ? Il s’en foutait en réalité. Tu précisais malgré tout que tu n’étais en rien responsable des conneries de ce dernier. Si la voiture était volée, c’était un peu le jeu, non ? Lui ne semblait pourtant pas de cet avis et sa remarque pincée te fit froncer des sourcils. « Attend voir ! Tu dis qu’une Barbie t’a fait la misère ? » Tu pinçais des lèvres, contrariée. Une poupée Barbie réclamant la propriété de la voiture à Seven ? Voilà que tout s’expliquait ! A tous les coups, c’était la voiture à Barbra ! Voilà pourquoi Seven n’avait pas fait plus d’efforts à récupérer la voiture ! Quel crevard oh my god quoi ! Tu te mis à rire toute seule. « Bon ben c’est simple, Seven avait volé la voiture à Barbra, sont cons ces yobbos j’suis morte !. » tu ris de plus belle. Dingue comme ils étaient solidaires entre eux !
Lui qui n’était pas mort de rire par contre, c’était bien Malcolm qui n’en pouvait plus de toi et tes histoires pourtant enfin éclaircies ! Voilà qu’il se remit à t’engueuler comme si tu y pouvais quelque chose à cette histoire. Ceci dit, vu ce qu’il t’expliquait, tu pouvais comprendre son énervement ! Tu ouvris d’ailleurs grand les yeux à son histoire de flic vénère ! « Mais ils sont cons ces flics putain ! Ça me fait penser qu’on avait volé une voiture de flic la dernière fois, tu veux voir ? C’était trop drôle ! J’ai filmé ! » racontais-tu non sans fierté. Non pas que tu te prenais pour un caïd, mais tu trouvais ça plutôt cool quand même. Jusqu’à ce que tu plaques ta main devant tes lèvres, les yeux brillants de malice, rieuse. « Si ça se trouve c’est parce qu’ils se sont fait voler leur bagnole qu’ils étaient vénères ! Genre t’aurais encore ramassé à cause de moi ! » tu ris de plus belle. Tu cessais néanmoins quand il s’approchait de toi, le doigt levé. Tu ne trouvais néanmoins rien à répondre à ça, au fond il n’avait pas tort, tu ne pouvais pas le nier. Heureusement, il semblait se calmer et le voilà qui se reculait pour aller s’appuyer contre sa voiture qui grogna un peu.
Tu soupirais avant de venir te poster à côté de lui contre le capot, faisant une moue renfrognée. « Tu veux que je fasse quoi ? J’savais pas qu’elle était volée ! Puis tu sais, j’aurais aussi pu te la mettre à l’envers et ne rien te donner du tout, t’aurais fait quoi ? » Tu marquais une pause avant de te redresser pour lui faire face, un sourire aux lèvres. « Tu sais quoi ? On a qu’à t’en trouver une autre ? Une bien ? Avec siège chauffant et boîte auto ? » tu perdis un instant ton sourire. « Mais elle restera toujours volée, hein… » puis d’un haussement d’épaule. « Si tu me files une clope, je t’aide. »

Mais Malcolm ! Je t’ai volé ta came, pas un rein ! Tu t’attendais à quoi ? Une Bentley ? Je plisse les yeux, complètement sidéré qu’elle puisse me sortir un truc pareil. Surtout que, demandez aux toxicos, ils préfèrent tous perdre un rein que leur came. Et deuxio, c’est pas ça le problème principal. Alors pour lui rafraîchir la mémoire pour la dix millième fois, j’articule lentement et avec énervement en pointant ma gorge du doigt : Un coup de taser. Dans ma gorge ! Mais on va pas revenir là-dessus encore une fois. Non pas que je suis passé à autre chose, parce que clairement, je suis encore hyper saoulé de cette histoire, mais y a encore plus urgent. Comme les emmerdes que j’ai eu avec les flics à cause de cette putain de voiture, de cette putain de blondasse, et de Meadbh qui m’a encore foutu dans cette merde noire. Et quand j’essaie de résumer la situation, elle s’embrouille encore plus. Elle, elle a pris la voiture à un Po-poquoi ? Laisse, c’est un connard qu’elle précise. Et je la regarde d’un air mauvais, la clope au bec, pendant qu’elle ricane visiblement très amusée par la situation. Alors que c’est trop pas drôle. Mais bon, si je devais lui faire remarquer à chaque fois qu’elle me gave, on serait pas sortie de l’auberge. Alors je tente de rattacher les bons fils ensemble pour comprendre pourquoi j’me suis pris une rouste de la part de ces connards de poulets. Et elle, elle veut peut-être m’aider, même si ce qu’elle me dit, c’est comme du chinois. Attend voir ! Tu dis qu’une Barbie t’a fait la misère ? Bon ben c’est simple, Seven avait volé la voiture à Barbra, sont cons ces yobbos j’suis morte ! Je fais un genre de grimace et la regarde les sourcils froncés. Elle s’attend vraiment à ce que j’y comprenne quelque chose ? P’tain May, je sais pas qui sont ces gens moi ! Elle parle tout le temps comme si je faisais partie de la famille et que ouais, bah ouais forcément que je connais Douze et Barbie princesse à la plage. Et voilà qu’elle est repartie dans son rire alors que je suis là à raconter ma mésaventure. Mais ils sont cons ces flics putain ! J’acquiesce d’un air évident en tirant sur ma clope. Si y a bien une chose sur laquelle tous les habitants de Detroit peuvent s’accorder, c’est bien ça. Ça me fait penser qu’on avait volé une voiture de flic la dernière fois, tu veux voir ? C’était trop drôle ! J’ai filmé ! J’arque un sourcil et lui lance une œillade. Ok, même si je la devinais barrée, je l’imaginais pas à voler des bagnoles de flics. J’suis un peu impressionné, faut que je l’avoue. Je fais une petite moue et tend le cou comme si elle allait me sortir son portable pour me montrer la vidéo - j’avoue que j’ai envie de voir. Je suis vite rattrapé par ma rancune envers elle. C’est dingue, elle m’énerve et m’énerve pas en même temps et quand je la trouve sympa, elle m’énerve aussi. Elle est chiante cette fille. De toute façon, avant que je n’ai pu dire un mot, elle gâche tout. Si ça se trouve c’est parce qu’ils se sont fait voler leur bagnole qu’ils étaient vénères ! Genre t’aurais encore ramassé à cause de moi ! Mais grave ! Je la foudroie du regard. Ouais, bah super ! J’te remercie pas ! Que je lâche bougon, et je me penche vers Rex qui attend toujours sagement, assis à mes pieds. Elle remue la queue d’un air satisfait. Et je soupire. Je la regarde se mouvoir pour se mettre à côté de moi contre la voiture. J’ai toujours l’air boudeur. Tu veux que je fasse quoi ? J’savais pas qu’elle était volée ! Je lâche un petit rire franc et sec. Mais geeeeenre. Je la coupe. Et popotruc là ? Tu savais pas que c’était la sienne ? Et genre, si tu m’as proposé directe une voiture c’était pas pour me calmer, c’était juste parce que c’était pas la tienne donc tu t’en foutais. Te fous pas d’moi. Je sais que je suis pas Einstein mais, quand même. J’peux faire deux trois liens dans ma tête aussi. Puis tu sais, j’aurais aussi pu te la mettre à l’envers et ne rien te donner du tout, t’aurais fait quoi ? J’entrouve la bouche. Elle s’arrête jamais elle, mais genre, jamais. J’ai jamais été en face d’une casse-couilles pareil. Elle se lève et se poste devant moi. Je tire une dernière fois sur ma clope avant de la jeter à ses pieds d’un air nonchalant et puis j’écarte les bras d’un air évident. Déjà, je t’aurais cassé la tête. Et même si j’ajoute à ça un sourire confiant, on sait bien elle et moi que c’était pas vraiment au programme. Même pas minable vengeance à coup de benzo mis discrètement dans son verre a eu plutôt l’effet inverse et elle a quand même passé une bonne soirée. Donc bon, je suis clairement pas très bon à ce petit jeu-là. Et ensuite, au moins j’me serais pas fait refaire le portrait par des flics frustrés, donc hein, ça serait peut-être mieux. Je croise les bras sur mon torse et hausse les épaules, toujours un peu saoulé. Sinon, tu pouvais juste me rendre le fric que tu me dois et… Mais je m’interromps à la vue de son petit sourire. Je plisse les yeux, elle a manifestement une idée derrière la tête. Tu sais quoi ? On a qu’à t’en trouver une autre ? Une bien ? Avec siège chauffant et boîte auto ? Je me mets à rire et me penche légèrement en avant. Alors c’est ça sa super solution ? Re-voler une voiture ? Je secoue la tête, ahuri, et marmonne : T’es complètement jetée. Et puis, j’commence à la visualiser la voiture. Les sièges chauffants. Les phares stylés, des supers jantes, la direction assistée, et le bruit du moteur classe. Je ferai grave des jaloux au Com avec une caisse comme ça. C’est certain que j’aurais plus d’allure que dans ce tas de tôle, auquel je jette un coup d’œil un peu dégouté. J’inspire profondément. Je suis typique comme mec. Typique du galérien qui donne dans l’illégal pour se faire son blé. J’rêve des tapis en peau de bête, des grosses voitures et des écrans plasma. Des fringues de marques, de baskets hors de prix. Typique, vraiment. La voiture, celle que je voulais me payer avec le casse de Monsieur Henry, celle qui m’aurait fait bien voir auprès d’Olivia, histoire d’être un mec, un vrai. Pouvoir rouler dans les rues de Delray avec un super truc. Arg, elle me soule aussi, à me prendre par les sentiments. Les sièges chauffants quoi ! Si tu me files une clope, je t’aide. Par réflexe, je sors mon paquet de cigarette de ma poche pour lui tendre. Et quand je me rends compte de ce que je fais, je m’écrie dans un sursaut : Comment ça si j’te file une clope, mais genre, tu m’aides un point c’est tout ! je tente de lui retirer d’un coup sec, mais elle en a déjà pris une. Raah, tu m’soules ! Que je commente en regardant dans mon paquet combien de clopes il me reste, je secoue le paquet, soupire et le range profondément dans ma poche comme si je la soupçonnais de m’en piquer d’avantage. Tu m’en dois une. Et me dis pas que t’as déjà payé ta dette, tu l’as pas fait. La voiture des autres cons elle compte pas. Je devrais juste lui demander l’argent qu’elle me doit et mettre fin à cette escalade de la connerie. Ouais, j’devrais mais… Des sièges chauffants t’as dit ? Je fais une petite moue et jette un coup d’œil à Rex, comme si j’attendais à ce qu’il me donne son avis. Vas-y, j’suis ok avec ça. Mais seulement si on fait ça proprement. Que j’me retrouve pas encore avec une hystérique sur le dos. J’en ai marre de moi-même des fois. Et la voiture doit être super cool. Je la regarde longuement. Et pas de coup fourré cette fois-ci. On trouve un pigeon avec une super caisse, on la pique, elle est à moi, et ensuite, peut-être qu’on sera quitte.

Il a quand même l’art et la manière de dramatiser la situation Malcolm et tu lui rappelles tout de même que tu n’avais fait que lui voler un peu de came, pas volé sa mère ! T’avais quand même un minimum de respect et puis, tu n’avais pas vraiment le choix ! Tu souffrais le martyre avec ta main cassée et lui avait directement abusé sur les prix. Evidemment, tu n’avais pas de quoi lui payer le prix, genre même pas un seul pauvre cacheton, mais il aurait pu te l’offrir vu ta situation, non ? Enfin ça fonctionnait ainsi dans ton petit monde, dommage que ton univers collait assez mal avec la réalité. Si c’était le cas, on ne te casserait pas la gueule aussi souvent. En comparaison, tu trouvais que Malcolm se plaignait quand même beaucoup pour ce pauvre coup de taser. Est-ce que toi tu pleurnichais pour tes os cassés ? « Oui et après, t’es un gros dur non ? t’as survécu ! » Bon, tu passais la pommade juste histoire d’avoir la paix, essayer de l’amadouer un peu. Tu ne voulais pas qu’il s’énerve davantage !
Pour une obscure raison, il semblait te croire à l’origine de tous ses ennuis alors de bon gré, tu tentais de lui expliquer que ses histoires, elles n’étaient pas de ta faute à la base. D’ailleurs, ça en revenait à un seul et même point : Si Seven ne t’avait pas cognée et cassé les doigts, tu n’en serais pas arrivée à l’agresser. Pourquoi est-ce qu’il ne remontait pas directement la source, hein ? Lui, ça ne semblait pas lui parler davantage quand tu lui expliquais ça, au fond on se fichait bien de savoir qui était qui, pas vrai ? « Tu sais déjà l’essentiel, c’est des cons ! » insistais-tu d’un haussement d’épaule, il n’y avait rien à dire de plus, rien à approfondir en tout cas. Après, ce n’était pas ta faute si Barbra lui avait tapé un scandale, quoique ça, tu pouvais encore comprendre, mais pourquoi est-ce que les flics l’avaient passé à tabac ? Il n’y avait aucune raison pour qu’il se fasse frapper pour une vieille bagnole de merde. Pour le coup, tu te sentais quand même mal pour lui. Sa tête n’était pas belle à voir dans cet état, ses blessures commençaient à prendre une surprenante couleur. Lui racontant votre exploit à toi et JJ, tu tapotais tes poches avant de réaliser qu’il était resté à l’intérieur. « Merde, le portable est dans la maison » puis dans la foulée, tu fis la connexion de trop, celle qui raviva sa colère. Tu t’en mordis la lèvre en le regardant un peu piteusement. Tu ricanais un peu nerveusement avant de le rejoindre. Tu étais sortie sans le portable, mais aussi sans veste et le froid commençait à se faire sentir. Tu frissonnais en croisant tes bras devant ta poitrine, attrapant tes bras de tes doigts froids. « T’es chiant Malcolm, comment tu voulais que je sache qu’il l’avait piqué à sa go ? Les gens normaux, ils l’auraient revendue pour pièces ou j’sais pas, t’aurais eu ta thune et l’histoire aurait été reglée ! » soupirais-tu, comprenant bien qu’il ne lâcherait pas le morceau. T’avais beau lui expliquer, il restait buté sur ses problèmes. Tu te relevais pour lui faire face. Tu sautillais un peu sur place pour te réchauffer avant de lui balancer tel quel qu’il aurait pu ne rien avoir du tout.
Sa réflexion te fit hausser des sourcils. « T’es pas sérieux ! » sifflais-tu en regardant les blessures de Malcolm. Est-ce qu’il était du genre à frapper les filles ? Non parce que toi, t’étais pas spécialement pour l’égalité des sexes à la base, tu ne demandais pas à avoir le même traitement que les hommes, hein ! « Pour les flics j’suis vraiment désolée, c’est des salauds ! » tu étais sincère, mais tu te mis à rire et ça ne te donnait pas trop de crédibilité. « Tu veux que je te file un médoc ? Un des tiens en plus ! » C’était une belle manière de boucler la boucle, non ? Tu n’étais pas vraiment sérieux et sans attendre, tu embrayais avec l’idée du siècle. Voler une nouvelle voiture. Une mieux ! A tes yeux, l’idée ne semblait pas si mal, mais Malcolm se mit à rire. Pourquoi est-ce qu’il ne te croyait pas ? T’étais sure que ça pouvait fonctionner !
Et dans l’histoire, tu parviens quand même à lui soutirer une clope, éclatant de rire devant la réaction de Malcolm. Un rire franc et joyeux. « Oh non mais t’es trop drôle ! » tu ris encore avant de coincer la cigarette entre tes lèvres. « D’accord » tu n’écoutes qu’à moitié et tu t’approches d’un pas. « Comme tu veux, tu as du feu aussi ? » demandais-tu gentiment en essayant de l’amadouer pour qu’il arrête de t’en vouloir quand il devrait juste en vouloir à Barbra. Heureusement, il était moins buté que les autres que tu connaissais, alors oui, tu hochais du menton. « Mais oui, tu pourras même choisir la couleur et tout ! » t’abusais un peu sans doute. A l’époque, vous aviez volé quelques voitures avec Cal, toi tu usais de ta minutie pour crocheter les serrures, et lui se chargeait de les démarrer. Du bon travail d’équipe. Sa remarque te fait lever les yeux sur lui. « Comment tu veux faire ça, voler proprement ? » puis secouant la tête comme si ça n’avait aucune importance tu hochais du menton. « Mais oui ! On va faire ça comme des pro ! Attends-moi là, je dois chercher mes affaires ! »

Même quand elle veut me faire des compliments, on dirait qu’elle se fout de ma gueule. En fait, c’est pas on dirait : elle se fout clairement de moi. J’suis pas contre un peu de chamaillerie, sauf qu’elle, c’est systématique. J’ai l’impression que je pourrais jamais gagner contre elle, et que d’une manière ou d’une autre, elle réussira toujours à me la faire à l’envers. Elle a l’air innocente comme ça. Genre gamine perdue et écervelée qui ne connait rien à la vie et à la rue. Et puis, plus j’avance, plus je me dis que c’est moi, qui ne joue pas dans la même catégorie que cette fille. Cours de manipulation 101 : brosser votre interlocuteur dans le sens du poil. Oui et après, t’es un gros dur non ? t’as survécu ! Qu’elle me sort. Et je plisse les yeux et marmonne des “gnégnégné” pas convaincu, sentant bien toute l’ironie qu’elle met dedans. Ou, au pire, c’est rien qu’une façon de me dire que si j’étais un vrai mec, je tournerais la page. Sauf que quand même : un coup de TASER. Là. DANS MA GORGE. Bref.

De toute façon elle change de sujet, avec son histoire de voiture volée aux flics, et même si elle ne semble pas avoir les preuves sur elle et que je suis un peu déçu parce que ça m’aurait fait marrer, je pense, faut pas que je me laisse déconcentré. Parce que c’est la pro pour ça : elle me sort tout un tas d’infos qui n’ont rien à voir les unes aux autres, me parle de ses dégénérés de copains comme si je les connaissais, tout ça, c’est rien que pour m’embrouiller. Le pire, c’est que ça marche. T’es chiant Malcolm, comment tu voulais que je sache qu’il l’avait piqué à sa go ? Les gens normaux, ils l’auraient revendue pour pièces ou j’sais pas, t’aurais eu ta thune et l’histoire aurait été reglée ! Je lâche un petit rire. Bah oui, ça va être de ma faute maintenant. Je commente, outré. Hého, elle m’a proposé une caisse, et puis j’en fais ce que je veux, moi. Tu sais à quel point c’est chiant de devoir demander à son frère d’emprunter sa caisse à chaque fois ? Suffit que Drax soit mal luné et bim, j’me retrouve à devoir prendre le bus ou j’sais pas quoi. Et si tu veux tout savoir, Drax il est souvent mal luné. Surtout ces derniers temps. Depuis que j’ai disparu 5 heures dans la nature avec sa caisse pour larguer ce débile du Black Crew dans les bois avec Nino, autant vous dire que Drax il me fait passer un interrogatoire chaque fois que je veux lui emprunter cinq minutes. Alors ouais, avoir une caisse, c’était plus important que de rembourser mes dettes, enfin, sur le moment ça m’avait semblé être la priorité. C’était avant que j’me rende compte que la caisse qu’on m’a filé est hantée par le fantôme des potes foireux de cette folle dingue de May.

Et quand je tente d’avoir un petit air menaçant, en lui disant clairement que j’aurais pu lui péter la gueule, là encore elle ne me croit pas vraiment. T’es pas sérieux ! J’arque un sourcil et tente de garder mon sérieux pour gagner un peu en crédibilité. Et j’acquiesce vivement pour lui dire que si, si j’aurais pu. Mais j’suis arrêté par un genre de petit rire et me penche légèrement en avant en tirant sur ma clope. Ouais, non, ok j’le suis pas. Nouveau petit rire. C’est décidément au-dessus de mes forces d’être pas sympa avec elle, alors que, clairement, elle le mérite. J’tape pas sur les enfants. Que j’ajoute d’un air rieur. L’atmosphère se détend petit à petit, si bien qu’elle s’excuse même du comportement des flics. Je perds mon sourire, encore un peu blasé de ce passage à tabac, même si clairement, c’est loin d’être la première fois que j’ai des emmerdes avec les flics. Tu veux que je te file un médoc ? Un des tiens en plus ! Je commence par rire gentiment pour la jolie image un genre de métaphore du “tu nais poussière et tu redeviendras poussière” mais du toxicomane, et je m’arrête subitement, la foudroie du regard. Eh, attends voir là… tu m’as pas dit que tu les avais plus mes médocs et que c’était ton mec ou j’sais pas qui qui les avait et que y en avait plus ? Silence, j’entrouvre la bouche. Mais quelle connasse ! Elle aurait pu me les rendre directement mes médocs alors ? Je secoue la tête, sidéré : BAH OUI, je les veux. Vas-y ramène moi mes cachets ! Mais évidemment, par je ne sais quelle pirouette de la manipulation elle arrive encore à s’extirper de la situation. Elle change de sujet radicalement et je soupire et me passe une main sur mon visage tuméfié. Incroyable, cette fille.

Et puis, elle prononce les mots magiques : sièges chauffants.

Et voilà je suis hypnotisé en deux minutes. Elle en profite même pour me soutirer une cigarette, merde ! Elle m’a encore eu. Et quand elle demande du feu, je soupire un grand coup et lui tend la flamme, sans pour autant lui donner. C’est un coup à ce qu’elle le glisse dans sa poche et que je me retrouve comme un con sans feu chez moi. De toute façon, trop tard. Dès que sa clope est allumée, je remballe le feu dans ma poche et croise les bras sur mon torse, d’un air bougon. Parlons de ma super caisse qu’elle m’a à nouveau promis. Mais oui, tu pourras même choisir la couleur et tout ! Comment tu veux faire ça, voler proprement ? Bleu, ou rouge. Ou noir mate. Ah ouais, c’est trop classe ça. J’me met à rêver complètement, avant de me souvenir de sa question. Voler proprement ? C’était mon fond de commerce, avant. J’indique l’épave contre laquelle je suis adossé. Bah, pas comme ça déjà. Pas comme avec monsieur Henry non plus. Cette histoire de traverse le crâne comme un éclair, aussi fulgurant. Je secoue discrètement la tête pour chasser ces mauvais souvenirs que je pensais avoir enfouis. OK, tu vas trouver la voiture et le pigeon, et tu te renseigne dessus, que ça soit pas un casse-burne. J’dirais chercher des plaques d’immatriculation et des outils chez moi. On se retrouve et… j’sais pas on verra sur place la stratégie. Dis donc, il a l’air infaillible mon plan.

Elle s’écrie qu’elle va chercher ses affaires et je reste là devant son manoir hanté. Je me rallume une clope et m’ennuie clairement, alors je shoot dans les petits cailloux et soupire. Quand je lève les yeux, je suis presque sûr d’avoir vu quelqu’un m’observer d’une fenêtre de l’étage. OK. Flippant. Heureusement pas elle tarde pas à revenir, May, à peine le temps de finir ma clope. Je la jette à ses pieds et ouvre la portière d’un grand coup de bras. Allez, on décolle. Mais avant ça, elle est là, à insister pour faire une photo d’elle avec la voiture, pour narguer les cons. T’es sérieuse ? Apparemment ouais. Je balance mon paquet de clope sur mon siège, et ouvre la portière arrière pour que Rex y monte. Quand je referme la portière je me dirige vers elle et lui arrache le téléphone des mains. OK, mais si t’envoies ça à cette connasse qui m’a fait chier, j’veux aussi être dessus. Le temps pour moi de nous prendre en selfie, assis sur le capot de la caisse, un majeur en l’air, et je rend le téléphone.

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