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 avant l'orage (jake)

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Dom Riggs
Dom Riggs

Feuille de personnage
avant l'orage (jake) 13e8298d6b883321e666c4befa8543c3 : sourire aussi éclatant que charmeur | toujours bien sappé, porte beaucoup de bijoux (bagues, chaînes, gourmette, une boucle d'oreille) | souvent une odeur de weed qui plane | quelques tatouages | cicatrice au niveau du poumon gauche (poignardé) | constamment en train de se marrer
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crédits : hoodwink (av), vocivus (icons)
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j'arrose la tombe de mon enfance mais
rien ne pousse si ce n'est l 'o u b l i

Points : 115
avatar : a$ap rocky
âge : vingt-huit ans.
statut : aimant à problèmes.
quartier : éternel squatteur, il n'a pas de chez lui mais trouve toujours un canapé sur lequel s'inviter - que ce soit pour une nuit ou pour un mois. le plus souvent, il crèche chez deandre, à mexicantown.
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MessageSujet: avant l'orage (jake)   avant l'orage (jake) EmptyVen 27 Mar - 11:38

Ça me prend comme une envie de pisser.

Peut-être parce que je tombe sur des vieilleries à force de retourner toute la piaule en quête d'un briquet disparu – pas moyen d'en trouver un dans cette foutue baraque, et je sais pas si c'est mon père qui me les pique tous parce qu'il perd toujours les siens quand il est bourré, ou moi qui les égare à force de les laisser traîner. Pas de feu. Mais des photos. Y en a une de Tyrone avec l'oncle Black, paumée dans un tiroir, au milieu d'un fouillis oublié. Il a sa pose de mec sérieux, mystérieux ; ça m'arrache un sourire. J'ai l'impression que ça remonte à une autre vie. Arrachée en même temps que la sienne, buguée parce qu'on lui a retiré la carte mère. Le système a été rebooté mais rien n'a plus jamais été pareil – j'ai redémarré mais je suis le seul, ma mère s'est tirée, mon père a implosé. Il ne reste que moi au milieu du champ de ruines.

Et je revois l'oncle, son sourire qui sait des choses que tu ne sais pas, sa compagnie qui m'a servi de bouée de sauvetage, à l'époque. Qui m'a appris un tas de trucs. Des trucs que Tyrone aurait dû être là pour me dire, me montrer, me forger. L'équilibre s'est fait la malle, comme lui, et celui sur lequel j'ai tenté de m'appuyer m'a donné des leçons aussi bancales qu'il pouvait l'être. C'est pas Jake qui dira le contraire.

C'est pas Jake qui dira quoi que ce soit – pas à moi.

Elle me dit plus rien du tout.

Je sors mon portable pour vérifier, affiche notre conversation où les bulles viennent essentiellement de mon côté, presque jamais du sien. Le dernier message que je lui ai envoyé date d'il y a trois jours, demande bêtement si ça va et si elle fait gaffe avec tout le bordel qui secoue la ville. Entre Krainz qui se transforme en zone de guerre et Delray qui fait flipper, tout est en train de bouger, et on sait tous comme ça se terminera parce que c'est toujours la même issue : le chaos. Alors je prends des nouvelles, parce que c'est ce qu'on fait dans ce genre de situation, avec les gens qu'on aime, avec la famille. Le vent qui m'a répondu m'a glacé jusqu'aux os. Je sais pas si elle m'ignore sciemment, juste pour le plaisir de me snober comme elle le fait depuis un moment déjà, ou si le message est passé à la trappe, perdu quelque part dans sa boîte de réception. J'ai envie de croire à la seconde option. Me convaincre que c'est un oubli ou une erreur technologique, rien de plus, parce que non vraiment, elle oserait pas m'ignorer, moi, son cousin, son ami, cet espèce de mélange qui se fait dans la famille éloignée. Elle oserait pas me faire ça.

Pourtant elle le fait déjà, depuis presque un an.

Et à ces gens qui disent que les liens du sang sont indéfectibles, j'ai envie de répondre qu'il peuvent aller se faire foutre. Les miens se sont tranchés et ont coulé coulé coulé – coulé comme le sang de Tyrone sur le porche, ce soir-là, coulé jusqu'à me donner l'impression de m'y noyer. C'est un suicide familial, veines tranchées, le sang qui nous liait s'est complètement vidé et il ne reste plus qu'une terre aride, craquelée, morcelée. Des blocs de sel qui s'éloignent les uns des autres, et quelque part au milieu, un cratère de la taille de Tyrone.

Jake m'aidait à combler le vide, un peu, parfois, mais maintenant elle ne fait qu'en causer un deuxième, creusant un nouveau trou alors que le premier prend déjà trop de place. Je sais pas pourquoi elle le fait. Je sais juste que j'en ai marre.

Pas de briquet, un joint perché derrière l'oreille, et une bonne dose de détermination au creux du bide. Si elle veut pas me répondre, je vais la forcer à le faire. Je supporte pas qu'on m'ignore. Je l'ai jamais supporté, mais venant d'elle c'est encore pire, parce qu'elle le fait trop bien, parce qu'elle est un vestige familial auquel j'ai tendance à m'accrocher trop fort. Parce que je l'ai pas mérité.

Quand j'arrive devant sa porte, j'ai le dos droit et le menton levé, prêt à livrer une bataille sans merci pour imposer ma présence. Je frappe, histoire de, mais ça ne répond pas assez vite. Peut-être parce que je n'attends pas plus de trois secondes avant de m'inviter à l'intérieur. Je m'avance tranquillement, comme si les lieux m'appartenaient. C'est l'un de mes nombreux talents : me sentir chez moi partout où je passe, jusqu'à donner le doute même aux propriétaires, qui ne savent plus s'ils sont chez eux ou bien chez moi.

Je tombe sur Jake et une femme, ambiance tamisée et bougies. Ça pourrait presque sembler romantique, s'il n'y avait pas une planche de ouija pour remettre les choses dans leur contexte. – Casper répond aujourd'hui ? J'ai un sourire en coin, un peu moqueur mais pas méchant. L'inconnue me fusille du regard, Jake n'a pas l'air ravie non plus. – J'dérange ? J'dérange. Elles n'ont même pas besoin d'ouvrir la bouche pour que je le sente. Je pourrais me sentir mal d'interrompre un truc pareil, mais à vrai dire, je m'en fiche un peu. Mes mains se lèvent devant moi en signe de paix et je les contourne, allant tirer une chaise pour m'asseoir dessus, légèrement à l'écart. – Faites comme si j'étais pas là, j'vais attendre mon tour. Petit haussement d'épaules désinvolte. Une paire d'yeux continue de me mitrailler, navigue de moi à Jake, comme pour lui signaler que je suis une nuisance et qu'il faut me dégager. Moi, je me contente de l'ignorer. À moitié avachi sur la chaise, je sors tranquillement mon portable d'une main, l'autre qui attrape le joint pour le faire tourner entre mes doigts. – Au fait, quelqu'un a du feu ? Le plus innocent de mes sourires se placarde sur ma face, alors que je les observe tour à tour. L'atmosphère est aussi lourde que mon regard qui pèse sur Jake, presque défiant. Je n'ai absolument pas l'intention de bouger.
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MessageSujet: Re: avant l'orage (jake)   avant l'orage (jake) EmptyDim 29 Mar - 13:29

Elle te regarde de ses grands yeux noirs, tempêtes miséreuses de désir impossible et de désespoir. Elle t'observe, et tout son être te crie, te supplie de lui accorder les mots guérisseurs, le message rédempteur du perdu à jamais, de l'oublié supplicié. Tu connaissais ce mec, un petit voyou du quartier, un négro souriant qui te proposait toujours de sortir, le soir, entre étoiles et trottoir. Toi, t'as toujours dit non, t'as toujours refusé en riant ; tu te moquais un peu, mais jamais méchamment. Et il l'a compris, le joli coeur vagabond, le petit soleil ténébreux qui a rendu l'âme, un soir, dans le tourbillon de le ville. Balle perdue, coeur trouvé, artères touchées, maman abandonnée. Mais maman, elle te connaît. Maman, elle veut y croire, en la rédemption rassurante, en la sublimation impossible, en la transfiguration de païen terrible, de sa chaire, de son sang, de tout son être. Toi, t'as pris ton air des grands jours, ton masque des moments métisses, entre ciel et terre, entre vivants et morts. Tu as accepté, docile, pour ses larmes rivières sur ses joues émaciées, pour sa douleur volcan sur son corps cratère. Il faut l'aider, t'aurais dit grand-mère, si elle était là. Il faut comprendre, il faut apaiser, malgré tes mains de meurtrières, malgré tes veines de bandit, malgré tes idées de chienne.

Il faut l'aider

Alors, tu as préparé la séance en silence. Tu as éteint les lumières, allumé les bougies, invoqué les forces secrètes qui grondent dans ton ventre, le soir, quand tout est repos et espoir. Tu as détendu tes muscles et rassuré maman, procédant au rite. La planche entre vous, le silence règne. T'es pas sûre qu'elle soit prête, t'es pas sûre de vraiment aider en acquiesçant au désir impérieux d'une louve à la dérive mais t'es certaine qu'elle ne renoncera pas alors, tu fais taire tes doutes et tes peurs. Doucement, le support, sous tes doigts, se dirigent vers les réponses révélatrices.

T'es jamais vraiment toi, lors de ces communications sacrées, chaman en transe, esprit figé. T'es ni ici, ni ailleurs, prêtant tes mains à un autre, luttant contre la force intense qui te traverse. La chamade de ton coeur, tes muscles contractés, ta voix au fond de ton ventre et les questions qui s'enchaînent, et les réponses qui rassurent, mal assurées, qui te rappellent à sa voix presque aussi éraillée que la tienne, à sa répartie branlante, à son sourire qui voulait tout dire sans jamais rien avouer. Son visage danse au fond de ton crâne, et tu revois, et tu ressens, et tu souris, toi aussi, au fond. Mais il y a quelque chose qui te dérange quand les lèvres se gonflent dans un éclat de rire sonore, quand les paupières se cambrent dans un pli coquin, quand le visage du passé se transforme en celui d'aujourd'hui et de demain. T'as les dents qui grincent, les sourcils fâchés, les pensées qui se bousculent parce que tu comprends pas ce qu'il vient foutre là, ce qu'il veut, où il est et pourquoi Dom prend soudainement empire dans ton crâne. T'as les émotions qui se ravivent, les sentiments contradictoires comme une tempête au fond de l'âme, l'amour et la culpabilité, la haine et la tendresse, la souffrance et la douceur, l'âme pleine de rancoeur. T'as le désir de fuite qui te prends à la gorge comme un animal chassé, poursuivi par ses pires regrets, hanté par toutes les erreurs de son passé. Les tiennes, les siennes, celles de ton père, de votre famille, de votre sang vicié, pourri, pollué par les mauvais choix, l'amour du danger, la fuite ou la mort exigées. T'as pas le temps de te réveiller qu'il est déjà là, au milieu de ton salon, comme un fier petit garçon. La tête haute, cette expression qui veut tout dire j'suis là, j'suis là et j'bougerais pas. Il avait la même quand t'étais gamine, quand il avait ce désir taquin de te faire tourner en bourrique, gentiment, doucement. Toi t'as peut-être jamais bien connu la douceur que dans ses yeux ; une douceur particulière, une qui ne ressemble pas à celle d'un grand frère ou même d'une maman mais c'était celle de Dom, et ça te suffisait.

Tu le fusilles du regard quand tu parviens enfin à retrouver tes esprits. D'habitude, ça te fait rire, les gens qui doutent, ceux qui se moquent de tes "sois-disant" pouvoirs, de ton don féerique, de ton aura maléfique. Ils te traitent de sorcière, de charlatan, de diseuse de bonne-aventure et tu te pares de leur mépris comme de la plus soyeuse des étoffes, comme de la plus belle des victoires. Mais venant de Dom, ça te donne pas envie de rire ; t'as déjà la colère qui gronde au fond de ta gorge, le sourire crispé, la mine hyène qui prévient de la tempête à venir. T'observes son petit jeu en silence, le joint qu'il cale sur son oreille, son air débonnaire qui cache le reste, sa posture de jeune loup qui te rappelle en un flash-back douloureux l'Autre, le frère, le fantôme, celui que tu vois en rêve, celui qui t'apparaît toujours tâché de la trahison de ton père. Je suis désolée, il faudra revenir Frances, tu t'excuses en un regard, franche, brute, nette. Tu sens la colère sans reconnaître d'où elle vient réellement ; t'as juste conscience de l'envie démente de frapper ton cousin, de le faire fuir à grand coup de ta folie animale et incendiaire. Le départ est rapide ; elle s'échappe comme une vipère effrayée par le combat des grands fauves à venir. Quand la porte claque, c'est l'attaque organisée de la petite soeur dérangée. J'te félicite, t'es officiellement celui qui m'a le plus cassé les couilles en un minimum de temps cette semaine. Sans compter ton pote le toxico et ton ancien amant cleptomane. Qu'est-ce que tu veux, Dom ? T'es pas le bienvenu et tu le sais très bien. Tu allumes une cigarette, éteignant les bougies sous ta démarche chaloupée, et soufflant ta fumée sur la cérémonie vidée de toute sacralité, ramenée aux pieds de votre règlement de compte pathétique. Le briquet glisse entre tes doigts. T'es pas décidée à lui tendre, t'es pas décidée à lui parler ; t'as dans le sang le dangereux mélange d'une femme blessante et blessée. Je suis pas d'humeur à jouer Tu le préviens, tu donnes le ton. T'as encore dans la tête la perte, le sang, les souvenirs de l'autre qui entrent en dangereuse résonance avec les deux morts qui vous séparent depuis longtemps.
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Dom Riggs
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MessageSujet: Re: avant l'orage (jake)   avant l'orage (jake) EmptyLun 30 Mar - 13:05

– Je suis désolée, il faudra revenir Frances. Ouais, hein, Frances, finalement c'est toi qui dérange parce que tu vois, moi, j'ai un tas de choses à régler avec Jake, à dire ou à demander, trop de brèches à colmater. C'est moi le plus important ici, moi qui dois rester. J'ai pas de fantôme à appeler – ou peut-être que si mais pas aujourd'hui – mais je crois qu'on aura besoin d'un rituel aussi, des bougies pour apaiser les esprits, ou peut-être pour foutre le feu.

Est-ce qu'on peut incendier des cendres ?

Frances s'échappe sans demander son reste, un dernier regard qui vient malgré tout me mitrailler, sûrement me maudire d'avoir mis fin à sa petite sauterie avec les morts. Elle n'a qu'à faire comme tout le monde : aller pleurer sur la tombe de son défunt et fermer sa gueule. Ou l'ouvrir grand, trop grand, rire à gorge déployée pour oublier les larmes qu'on ne laisse pas couler. J'en sais rien Frances, putain démerde-toi, on galère tous avec ces salauds de cadavres planqués dans les placards et sous les lits, au fond des cœurs, là où ils pourrissent petit à petit. Peut-être qu'on est tous un peu hantés. Elle, moi, Jake aussi et tout Detroit avec nous.

La porte claque, je continue de faire tourner le joint entre mes doigts. Mes yeux remontent vers Karaba et je comprends qu'aujourd'hui, c'est moi l'épine plantée dans son dos. Je compte bien y rester logé, m'y enfoncer encore et encore, jusqu'à la rendre folle, jusqu'à faire assez mal pour qu'elle explose. Je trouverai peut-être mes réponses dans les résidus d'elle et de nous. – J'te félicite, t'es officiellement celui qui m'a le plus cassé les couilles en un minimum de temps cette semaine. Le sourire qui tord ma bouche est insolent, attise les braises que je vois déjà rougeoyer. C'est plus fort que moi. Je pousse le vice à poser une main sur mon cœur, feignant l'émotion ou peut-être la fierté, putain Jake, si tu savais comme j'suis touché. – Trop d'honneur. T'inquiètes, j'crois que c'est un talent familial. Parce qu'elle me casse les couilles, elle aussi. Elle me les casse depuis un an, avec ses silences et ses crocs trop acérés, les écorchures qu'elle me laisse alors que je n'ai rien fait pour les mériter. Je ponctue mes mots d'un clin d'œil faussement complice, toujours le même air de petit con placardé sur la face.

Je l'agace, je le sais. C'est exactement le but recherché.

Si je l'irrite assez, elle n'aura plus d'autre choix que de faire attention à moi, ne serait-ce que pour trouver un moyen de se débarrasser. Et pendant qu'elle cherchera la recette du bon répulsif, je pourrai me faufiler dans les failles, dans sa tête, fouiller pour comprendre ce qui a vrillé. Ce qui a merdé avec moi.

Elle attrape une cigarette. – Qu'est-ce que tu veux, Dom ? Je lorgne sur la flamme qui vient lécher le bâtonnet pour l'allumer, Jake qui lâche un nuage de fumée dans un souffle. Le mien se suspend une seconde, comme si j'avais avalé une taffe en même temps qu'elle. Mais mon pétard est toujours désespérément éteint entre mes doigts. – J'l'ai dit : du feu. Déjà, pour commencer. M'encrasser les poumons pour me nettoyer l'esprit. Je tends une main, mais Jake n'a pas l'air décidée à partager son briquet – pas plus qu'elle n'a envie de partager son oxygène avec moi, apparemment. Je souffle. – C'est bon, sois pas reloue. C'est trop tard pour ça. Rabat-joie reloue lourde, elle l'est, elle pèse sur ma poitrine et elle ne veut même pas me dire pourquoi.

Paraît que les sorcières sont pleines de secrets, et Jake ne fait pas exception à la règle. J'ai une soudaine envie d'allumer un bûcher.

– Je suis pas d'humeur à jouer. Avec les fantômes oui, avec moi non. Peut-être qu'elle me parlerait un peu plus si j'étais mort. Pendant une seconde, je me demande si Tyrone a droit à un peu plus de considération que moi, mais quelque chose se serre au creux de mes tripes et l'idée est rapidement chassée par un soupir. – Ça va, relax. J'suis pas là pour me battre. Mon dos s'appuie nonchalamment contre le dossier de ma chaise, mon bassin qui s'avance un peu plus – j'suis complètement avachi. Comme si ma posture cherchait à lui montrer qu'elle peut ranger les armes. Pas une once d'agressivité dans ma voix ou mes gestes, mais un océan d'amertume au fond des yeux. – Vu qu'tu réponds jamais à mes messages, j'suis venu voir en personne si t'étais toujours vivante. Je hausse les épaules et la scanne de bas en haut, puis de haut en bas, comme si je la passais aux rayons X. – Apparemment ouais. Elle est aussi vivante que peut l'être quelqu'un qui pense parler aux morts ; c'est-à-dire pas tout à fait, un pied dans chaque monde, quelque chose de spectral dans son aura. J'y crois pas tellement. Peut-être parce que j'ai trop peur d'être déçu, si je m'y risquais et n'obtenais pas ce que je veux des fantômes. Du mien.

– Tu m'fais chier. Ça sort tout seul, un peu brutalement. Comme si j'avais dégueulé. – Sérieux Jake, t'en as pas marre de m'ignorer là ? Moi oui. J'en ai marre, j'suis fatigué, vexé, énervé. Elle me laisse me noyer dans l'incompréhension, les vagues se fracassent sur ma gueule et j'en ai assez de boire la tasse. Le sel m'arrache la gorge. – C'est quoi ton problème ? Au début, je pensais juste qu'elle avait besoin de temps pour panser ses plaies, surmonter le deuil de cet enfant jamais né. J'peux comprendre. J'en ai vu d'autres s'isoler, s'enfermer ou même se tirer, pour se remettre de la mort. Chacun fait de son mieux. Mais elle m'a fermé la porte et l'a verrouillée à double-tour, elle a avalé la clé sous mes yeux alors qu'elle rouvre les fenêtres pour les autres. J'ai l'impression d'être le seul qui n'a plus le droit d'entrer, alors que j'ai rien à voir avec tout ça. Je ne comprends pas, je ne la comprends plus, elle. Quelque chose s'est rompu.
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MessageSujet: Re: avant l'orage (jake)   avant l'orage (jake) EmptyMer 1 Avr - 21:12

La tension est palpable, pesante, asphyxiante. Elle t'étreint la gorge comme une amante amère, te serre la poitrine, te broie le coeur comme des milliers de bris de verre. T'as pas envie qu'il soit là, t'as pas envie d'avoir cette explication, de devoir mentir ou de lui donner raison. T'as pas envie d'expliquer à quel point tu l'aimes et tu le hais, combien c'est dur de devoir penser tous les jours à ce dont il t'a privé. Maternité avorté, regrets bourreaux, vies détruites, souvenirs en lambeaux qui tournent tournent tournent tous les jours, toutes les nuits, toutes les heures, à chaque fois que ton esprit n'est pas endormi, que ton âme crie à l'agonie. T'as beau essayé, t'as beau prié, t'as beau invoqué tous les dieux et tous les esprits, les pardons, les punitions, les sacrifices, les insomnies, rien n'y fait. T'es piégée dans ta propre vie, encerclée de toutes tes douleurs ayant comme emblèmes son sourire, sa voix et ces nuits fatidiques où un fils est parti, assassiné, kidnappé à jamais par la bêtise de votre jeunesse, par la trahison d'un ancien. Des fois tu te dis, coincée dans une crise de folie, que c'est juste, c'est honnête ; une vie pour une vie, une mort pour une mort, la dette est payée, y a rien à regretter. Y a plus qu'à oublier Jake, y a plus qu'à effacer ; la colère, les regrets, l'imagination sordide de ce que vos vies auraient été. Et si Ty était toujours là ? Est-ce qu'il aurait tenu ton enfant dans ses bras ? Est-ce qu'il aurait souri, est-ce qu'il aurait félicité ton père d'avoir pris du galon, des rides de plus, un héritier dans les langes de son beau royaume ? Est-ce qu'il t'aurait serré dans ses bras, est-ce que t'aurais enfin retrouvé le sourire que t'as perdu depuis des mois ? Bonheur enterré dans sa tombe, t'es le métissage morbide entre ta vie et ses morts, et tes morts, que tu refuses d'accepter, dont le deuil est la dernière chose que tu désires accomplir. Tu veux te souvenir, tu veux avoir mal et des fois tu veux même te venger, contre le monde entier, déchirer la terre, ouvrir les cieux et comprendre pourquoi tous ceux que t'aiment s'éclatent entre tes mains de sorcière, entre tes doigts d'enfant déshérité, dans ton destin de fausse madone maudite.

Tes yeux fixent les siens. T'attends. T'attends patiemment qu'il arrête d'éluder la question, sous ses lèvres de grand gamin, sous ces facéties que tu connais par coeur. Tu te perds dans la contemplation de ses traits, visage familier et tu crois reconnaître, en un petit éclair assassin, le sourire de son frère, un tic de ton père, le masque rieur des hommes de ta famille. Ca te donne envie de rire, ça te donne envie de crier, mais tu restes silencieuse, toujours les yeux dans les siens. T'encaisses le reproche. C'est vrai que tu réponds pas et tu sais pourquoi, tu sais que t'as pas envie de faire semblant, d'esquisser un oui, tout va bien, et toi, comment tu vas ? parce que tu sais même pas si t'as envie de savoir, si t'as envie de toucher de près ou de loin ce bout de famille décimée, ce lien orphelin qui git, pathétique, sur les cendres de vos pertes. Ouais Dom, j'suis toujours vivante, ouais Dom, j'ai pas envie de t'parler, ni d'te voir, ni d'entendre le son de ta voix, ni de respirer ton odeur. J'ai pas besoin, j't'ai tous les jours dans la tête, et ça tourne putain, et toi, toi, avec ta grande gueule d'innocent tu sais toujours pas pourquoi, et j'veux pas que tu saches, j'veux pas que tu comprennes, à quel point c'est sombre entre nous, à quel point on a atteint un point de non-retour. T'as les pensées qui dansent, qui défilent, qui tournent autour de ta tête, qui font vriller ton incommensurable détermination à ne pas lui répondre. Tu sais juste qu'il faut qu'il parte, que c'est pas le moment ; que ça le sera sans doute jamais.Je t'ignore pas. Tu finis par répondre à la question fatidique. Tu pensais pas que ce serait un mensonge qui te viendrait instinctivement aux lèvres et tu t'en veux. T'as jamais été une menteuse, t'as jamais été lâche et il le sait très bien. J'ai juste pas envie de te voir. Tu lâches. T'es mauvaise, t'es sale et tu le sais très bien mais tu trésailles pas quand tu fumes le bout de nicotine pathétique qu'il te reste entre les doigts, quand tu détruits la dernière chance pour que cette discussion se passe bien. Prends ton feu et rentre chez toi, Dom, t'as rien à foutre ici. Tu lances  le briquet-excuse, le briquet qui fait mal. J'suis désolée crie ton coeur, et reviens pas hurle ton âme. Si tu le prends dans tes bras, t'es pas certaine de te retenir de lui planter une lame.
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