wild way (mjoey)

Elle secoue énergiquement la bombe de peinture et se penche sur le capot. hijo de puta qu'elle tague sur la jolie carrosserie. L'instant d'après, une vitre arrière explose, et provoque l'hilarité générale, c'est Daisy qui a cogné sa batte contre le verre fumée de cette caisse hors de prix. Comment ce trou du cul à pu se la payer ? Aucune des filles ne se posent la question. Elles ne sont que trois ce soir, c'est une soirée d'avertissement. Le type est entrain de baiser sa maitresse dans l'une des chambres du Red Roof, la femme n'est pas encore au courant, mais c'est une amie d'Alba. Quand elle a deviné que son mari la trompait, elle est devenue folle. Elle veut quand même lui laisser une chance. Une seule de comprendre, et puis après elles s'occuperont de son cas. MJ n'était pas d'accord. Ça sert à quoi de leur faire comprendre ? Ils comprennent jamais de toute façon. Leur instinct est trop fort, ils ont aucun contrôle. Des bêtes sauvages. Mais elle se plie aux ordres d'Alba, elle attend le moment où elle se rendra compte elle-même de sa connerie. Et puis, ce n'est pas parce qu'elle aurait fait une vengeance plus salée qu'elle ne peut pas profiter de celle-ci. Détruire les voitures, ça a commencé comme ça. Trish se baisse et fait exploser l'un des pneus d'un coup de canif, elle tourne ensuite autour de la voiture pour tous les éventrer. MJ dessine encore quelques obscénités sur la voiture, avant de sortir ses clés de sa poche. Elle raye la portière dans la longueur avant d'arriver à la porte ouverte, là elle passe un bras à l’intérieur pour déverrouiller la voiture. Après ça elle ouvre celle, côté passager, et s’installe sur le fauteuil en cuir. Elle fouille dans la boîte à gants. Des clopes, les papiers de la voiture, du fric. Elle passe tout ça à Trish qui installe le tout sur le goudron, elle allume un petit feu juste après. Elles ne se servent pas du fric de ces enflures : elles le brûlent, leur papiers aussi, leur identité si elles ne peuvent. Qu’ils se retrouvent sans rien, complètement à poil, et vulnérable. Dans le fond de la boite à gants, une série de clichés polaroid, mettant en scène ce type, sa maîtresse et quelques rudiments du bandage. Il garde ça au fond de sa boîte à gants comme un trophée, à la portée de tous, de sa femme. C’est d’ailleurs comme ça qu’Alba a découvert la vérité. Elle veut les photos pour le menacer avec. MJ fait tomber le bandana qu’elle à devant le nez et la bouche autour de son cou. R’gardez-moi ce sale chien. C’est comme si il veut être pris ! qu’elle balance, avec sa syntaxe pourrie et l’intention sauvage dans sa voix. Elle envoie les quelques clichés dans son sac à dos posé à ses pieds et commence à lacérer le cuir avec son opinel. Mais déjà elle sent une main sur son épaule. Elle sursaute, lionne aux aguets, ce n’est que Daisy qui replace le foulard qu’elle a devant son visage. Gaffe, y a une gosse qui arrive. Une gosse ? Qui traîne au milieu de la nuit dans le parking d’un motel ? Elle fronce les sourcils MJ, et elle regarde dans le rétroviseur. Y a un petit sourire qui fend son visage. C’est pas una niña. Qu’elle commente avant de se lever du siège passager, le bandana encore autour du cou. Pas besoin de se cacher, ce n’est que Joey.

À genou sur le siège en cuir, accoudée sur le toit de la jolie voiture, elle regarde Joey arrivée, s’étonne un peu de la voir seule. Peut-être bien que le reste des joyeux compagnons vont se ramener sur ses talons. Peut-être qu’elle est là en off, peut-être encore qu’elle a pris du galon et qu’elle n’a plus besoin d’être contrôlée par le chef de gang pour aller sur une scène de crime. MJ n’en sait rien, ça fait un bail qu’elles ne se sont pas vu. Dans le fond, elle est toujours contente de la voir. C’est surtout avec les autres qu’elle avait des souci d’entente. Avec les autres que y avait des tensions. Joey, elle se dit juste que c’était trop tôt pour elle, mais qu’un jour ou l’autre elle finira par virer de bords, rejoindre les filles, casser des gueules, venger des femmes. Peut-être bien qu’elle virera de bord tout court, qu’elle aimera ces femmes qu’elle défend. MJ attend ce jour avec impatience. Hola Josefina ! Il est où Captain America ? Elle parle de Sol. Du mâle blanc qui prend les décisions dans leur club à mi-chemin entre les Avengers et les chevaliers de la table ronde. Dans le fond, MJ l’aimait bien Sol, il était cool. Mais la domination des hommes, elle n’a jamais pu la supporter très longtemps, peu importe la sympathie qu’elle avait pour lui. Daisy et Trish se sont arrêtées, restent en retrait, pas rassurées d’avoir un témoin. Mais l’assurance d’MJ les gardent silencieuses, le temps de voir comment tourne les choses. Finalement, MJ fait le tour de la voiture et s’adosse contre une vitre qui n’est pas pétée. Elle ramasse sa batte posée contre un des pneus crevés, surtout pour le style. T’inquiète, pas de souci ici. Tu peux rentrer tranquille. Elle lui fait un sourire mais reste méfiante. Y a quelque chose entre elles maintenant, un genre de gouffre.

MJ trouve qu’elle n’a pas tellement changé depuis le temps. Et pourtant y a quelque chose dans son regard, dans sa solitude qui n’est pas normal. Ils se déplacent en bande, les Avengers, comme une unité d’élite qui viendrait patrouiller les rues. Elle comprend pas trop, mais l’ton de la blague est lancé. Joey y répond du tac au tac : Va savoir, il aide peut-être une mamie à traverser la rue. Le rire d’MJ éclate sur le parking, faut dire qu’elle est bon public. Ça serait son genre. Qu’elle commente. Parce que pour elle ça a toujours été ça le problème avec les joyeux compagnons : trop de gentillesse, de bons sentiments. Y a des conflits qu’on ne peut régler que par la violence. Y a des gens qui ne comprennent que face contre terre. Y a des personnes qui méritent pas d’être sauvée, d’autre qui sont des causes perdues. Et Sol il voulait pas entendre ça. Il voulait pas entendre MJ et ses discours radicaux, ses méthodes peu conventionnelles. MJ elle a la haine contre trop de gens. Elle est l’héritière de parents révolutionnaires, qui sont tombés au combat. Elle n’arrêtera jamais la lutte, et encore moins parce qu’un homme lui dit de le faire. Elle fait l’tour de la voiture pour s’approcher d’Joey.

Ça fait longtemps, Maria-Josée. Mierda. MJ ferme les yeux une seconde. Daisy et Trish la regardent d’un même mouvement. Jusqu’à ce que l’une d’elle ne s’y risque. T’as pas dit que c’était MariJuana ton prénom ? - Et t’y as cru ? Qu’elle réplique du tac au tac, parce que c’est dans ses veines de faire ça. Les filles haussent les épaules et gardent leur distance, voyant bien que y a des trucs à rattraper entre les deux filles. MJ jette un regard lourd de reproche à Joey, elle lui payera d’avoir foiré sa couverture. Pas tellement que ça ait une quelconque importance, mais elle déteste qu’on l’affiche devant qui que ce soit. Alors la voilà avec sa batte de baseball, qu’elle calle derrière sa nuque. Elle en profite pour s’étirer, à droite, à gauche, remuer, comme si elle en avait juste marre d’attendre. Joey quant à elle regarde la voiture par-dessus l’épaule d’MJ. Elle cherche pas à cacher son crime, la colombienne. Elle cherchera jamais à le faire. Elle assume sa haine trop forte et ses idées tranchées, elle aime sa façon de faire payer aux hommes tous les crimes du monde. Elle aime son oeuvre, sur cette jolie voiture bien trop chère pour le quartier, elle voudrait la montrer au monde entier si elle ne risquait pas de prendre du ferme pour ce type de délit. Alors elle attend, l’air conquérant sur le visage, un sourire assuré. Elle ne fixe que Joey, et guette ses réactions. Y a qu’une chose qui l’a toujours déçu chez elle, c’est que Joey passe son temps à se cacher, à se mentir, à faire dans la demi-mesure.

Il a fait quoi pour mériter votre colère ? MJ hausse les épaules d’un air évident. C’est un homme et c’est déjà une très bonne raison d’être en colère contre lui, qu’elle voudrait répondre. Mais Trish et Daisy se contentent d’un coup d’œil et les lèvres d’MJ reste scellées un moment. En quoi c’est ton problème ? Qu’elle demande, l’air de la défier. Plus du même monde. Trajectoire parallèle. Joey a fait ses propres choix à l’époque, et aujourd’hui encore. Elle le suit lui, Sol. MJ refait tomber la batte de baseball dans le vide, la fait tournoyer sur le côté d’un air légèrement théâtral et puis finit par la faire racler le goudron, juste à côté de ses baskets. Bon, écoute. Pas de témoins, tu sais. Alors tu participes ou tu t’en vas. Choisis. Elle est catégorique, mais elle force le trait. Elle voudrait la voir participer, se libérer, mais elle ne peut pas prendre la décision à sa place. Elle se contente d’un regard de braise.