intrigue // (mj) killing in the name

@mj velasco

C’pas parce qu’Athé veut pas qu’tu partes que tu partiras pas. C’pas parce que Nino est une putain de poule mouillée qu’toi tu poursuivras pas les recherches. Merde, t’étais sûr qu’cette nana qu’vous avez vu s’faire chopper allait atterrir dans un trafic. Tu lui avais dit, à Nino. T’avais mené l’enquête, sur c’foutu dark web où t’as découvert des trucs vraiment dégueu. Mais il a pas voulu t’écouter.

Alors toi, t’avais un plan. Enfin, un début d’plan. T’infiltrer dans le trafic, en tant que trafiquant. Histoire d’voir ce qui se tramait. Histoire d’retrouver la meuf qui ressemble tant à ta soeur. Histoire d’la sauver. Même si t’es pas c’gars là. Toi, tu sauves personne. T’es plutôt celui qui envoies à l’hosto sans y réfléchir à deux fois. Mais t’sais pas, là, t’as cette sensation d’responsabilité qui t’fout mal et t’as besoin d’agir.

Alors tu marches jusqu’à Delray. Veste en cuir sur le dos, mains dans les poches, poing américain passé aux doigts de ta main droite. On sait jamais, tu pourrais p’têtre en avoir besoin. Parce que tu marches jusqu’à la maison illuminée des néons rouges. C’pas en Europe qu’y’a un truc comme ça? La rumeur s’est vite répandue dans les rues d’Détroit. Ces disparitions, elles sont réapparues comme par magie dans les murs de cette baraque. Réseau d’prostitution, à c’qu’on dit.
Alors tu vas y aller toi, tu donneras quelques billets, tu refuseras les pipes qu’on t’proposera — enfin, c’est c’que tu t’dis, du moins — et t’essayeras d’arpenter les couloirs à la recherche de ta cible.

Quand t’entres dans le hall, c’est une ambiance à la fois glauque et sulfureuse qui t’enveloppe. Ouais, la lumière rouge, ça fait grave son effet, tu peux pas le nier. L’hôtesse te tend un genre de livret plastifié et quand tu feuillettes les pages, tu t’rends compte que c’est un répertoire des nanas disponibles. Bah, parfait, tu retrouveras plus facilement celle que tu cherches. Appuyé contre le comptoir, tu tournes les pages une par une, lisant chaque description avec attention pour pas passer à côté de ce pour quoi t’es venu.

Toi t’es là, tu regardes tranquillement le ‘menu’ pour essayer d’retrouver votre meuf disparue, à Nino et toi. Même s’il est pas chaud, t’as quand même réussi à l’embarquer dans l’enquête. Mais ouais, tu piges, il a un gamin lui, il peut pas risquer sa vie pour une nana qu’il n’connait pas. Mais toi, risquer ta vie, tu t’en branles un peu. Tendance à t’sentir invincible, tu t’dis que même s’il t’arrive les pires merdes du monde, t’arriveras à t’en sentir. Tu sais cogner, ça d’vrait suffire nan? C’est c’que tu te dis.

Avant qu’ce n’soit le brouillard. Fumée qui s’propage à l’intérieur de l’accueil de la grande maison. Tu rabats un pan de ta veste en cuir par-dessus ton nez et ta bouche — histoire d’pouvoir un minimum continuer à respirer. Quand t’entends un cri. Cri d’guerre. "LIBÉREZ LES FEMMES. STOP À L’ESCLAVAGE. À MORT LES HOMMES." À mort les hommes? Pardon? C’est qui ces tarées encore là ? Les fumigènes se dissipent, tu brasses de l’air grâce au catalogue que tu tiens toujours dans ta main. Que des meufs, visiblement vénères. Elles taguent les murs, elles gueulent à s’en défoncer les poumons, elles détruisent le matos. Toi, tu r’gardes un peu la scène de loin. Tu vois les coups qui pleuvent, les battes de baseball qui font craquer les os. T’as connu ça toi, que ce soit d’un côté ou de l’autre. Elles ont du cran ces meufs, t’es limite un peu contemplatif. Trop habitué à Athéna, qui n’frappe jamais. Son arme à elle, c’est les mots, pas les poings. Alors voir des meufs qui font des passages à tabac, ça t’fait limite tripper. T’as envie d’rire de bonheur, presque. Et ouais, t’as même le sourire qui vient étirer tes fines lèvres.

Puis y’a ton regard qui croise celui d’une des meufs. Une brune typée, elle a l’air Latina c’te meuf là. Et d’une seconde à l’autre, elle fait virevolter sa batte dans ta direction. Et toi, tu recules vite d’un pas, tout juste pour pas t’faire avoir. "Eh oooh!" On s’calme là, t’as rien d’mandé toi. Elancée, elle atterrit près de toi, s’accroche au catalogue que t’as dans les mains. Ouais non, là tu comprends qu’ça risque de pas très bien se passer pour la suite des événements. Son regard se noircit. "Sale chien, ça t’fait bander de les regarder ?!" Et t’as même pas l’temps de répondre qu’elle fonce sur toi comme un pitbull enragé et qu’elle te plaque au sol. Faut qu’elle s’mette au football américain elle, la vérité. À califourchon sur toi, ça aurait pu être plaisant dans un autre contexte — genre, si elle venait pas d’écraser son poing dans ta gueule. Et encore une fois. Aïe. "J’vais te crever fils de pute." Tu ris un peu. "J’crois pas non." Ça risque pas. Main qui attrape sa gorge, qui appuie sur l’milieu pour provoquer la suffocation. Assez pour la déstabiliser, assez pour inverser la tendance et la renverser pour que toi tu te retrouves sur elle. Tu craches le sang sur le côté avant d’planter tes yeux dans les siens. "C’est pas c’que tu crois, j’suis pas là pour ça." Ça = tout ça, ces nanas à vendre, ce trafic, whatever. Enfin si, mais non. "Alors écoute moi bien : c’est bon, tu calmes tes nerfs, j’vais te lâcher, et t’as pas intérêt d’m’énerver parce que ça va mal se passer. J’ai mieux à faire là que d’m’occuper d’une nana qui cherche un truc pour s’défouler." Et tu lâches sa gorge pour te relever.

Ça commence à te casser les couilles que tout le monde se mêle de tes affaires. Ça r’garde personne à part toi — et Nino, en l’occurrence, et encore — mais non, faut toujours que quelqu’un s’sente impliqué d’une façon ou d’une autre. Et t’avais pas prévu d’te battre, ce soir. Encore moins avec une nana. Non, toi, tu voulais juste observer. Affiner ton plan. Parce que ok, Nino et Athéna avaient raison quand ils t’ont dit que ton plan n’était pas vraiment un plan. Que t’avais aucune stratégie. Mais putain, vous portez bien vos noms chez les Kaiser, la stratégie c’est le domaine d’Athéna. Toi t’es les poings, toi tu fonces dans le tas sans réfléchir, t’avises en fonction de ce qui arrive. Mais tu veux pas mêler Athéna à tout ça. T’as jamais voulu qu’elle trempe dans tes histoires miteuses. Cette vie là, c’pas pour elle.

Et pour une fois qu’tu viens pas pour foncer dans le tas, c’est c’te folle qui te fonce dessus. Sauf que tu la remets vite à sa place — l’étranglement, ça fait toujours son effet visiblement. Compliqué d’parler quand t’arrives plus à respirer, hein? Elle se débat, cherche à donner des coups, tente de dire quelque chose qui lui reste coincé dans la gorge. Tu lui dis qu’c’est un malentendu, et qu’pour son bien elle devrait plutôt tenter de te lâcher. Au bout de quelques secondes, elle se calme et comme promis, tu la lâches et tu te relèves pour reculer de quelques pas.

Sauf que putain, preuve que les femmes n’écoutent jamais quand on leur parle — elle t’assène d’un sale coup dans ton entrejambe qui t’fait instantanément te plier en deux sous la douleur. "Sale pute!" Que tu pestes, réaction à la souffrance, sidéré qu’elle ait souhaité continuer dans cette voie alors qu’tu l’as lâchée tranquillement. "Tu m’trouves assez calmes comme ça, bastardo ?" Souffle coupé, elle t’agrippe par les cheveux et te cogne la tête contre le comptoir. "T’es une putain de folle furieuse!" Que tu gueules, avec conviction. Tu lui as rien fait à c’te meuf putain, qu’elle s’occupe de sa gueule plutôt que d’venir te chercher la merde. "T’avise plus de me parler comme ça toi." En même temps, qu’est-ce qu’elle attend? C’est elle qui t’a sauté dessus, c’est elle qui cherche à t’anéantir et tu devrais lui lancer des fleurs? Ça va pas la tête ou quoi? Ses doigts tirent sur tes cheveux et tu fais la grimace, quand tu sens son souffle heurter ta joue. "Allez, raconte, t’étais là pour quoi si c’était pas pour te commander une fille ? Tu fais partie d’ceux qui aiment regarder, c’est ça ?" L’truc qu’elle pige pas c’est qu’si elle attend une réponse, elle devrait t’laisser le temps de la lui donner. Plutôt qu’te reclaquer la tronche contre le comptoir. Tu gémis. Aouch. Et tu commences à sentir le goût du sang t’remplir la bouche. Tu grognes quand elle tire à nouveau sur tes cheveux pour t’faire lever la tête. Tu craches le sang par terre — qu’elle s’estime heureuse que tu lui ai pas craché dans la gueule, c’te salope. Et tu vois des filles qui s’font sortir. Alors t’ouvres les yeux. Concentré sur celle que tu cherches. Parce que p’têtre qu’ces meufs tarés l’auront trouvée. T’espères. "Tiens si t’aime regarder, mate ça. Ça t’plait mon grand ?" "T’es tarée putain…" qu’tu lâches, le souffle encore un peu court. "Si tu m’avais laissé répondre à tes questions j’t’aurais dit qu’on était là pour les mêmes raisons, toi et moi. J’venais chercher quelqu’un. Pauvre conne va." Parce que t’aurais pu être un allié de plus pour elles toutes. Avoir un mec s’infiltrer dans un réseau de mecs, ça aide. Parce que là, c’bien, elles vont en sortir quelques unes. Et le reste? Ça s’trouve ils vont bouger leur QG. Renforcer la sécurité. Des gardes armés. Un casse de ce genre sera plus possible, ils seront préparés maintenant. Et ça fout aussi un peu en l’air ton plan pour retrouver l’sosie de ta soeur qu’t’as vu se faire enlever. Elles ont p’têtre du cran mais elles sont pas très malignes visiblement.

C’est une psychopathe, c’te meuf. Elle te matraque comme si c’était toi le Mac de cette putain d’maison close. Alors que bordel, pour une seule putain de fois où tu veux jouer les héros, tu t’fais casser la gueule par une féministe extrémiste. Tu v’nais sauver une p’tite meuf sans défense, là. Tu v’nais pas mater. En plus, c’pas comme si ça t’intéressait. Toi qui baises tous les 36 du mois avec des critères physiques bien spécifiques — et franchement déviants, tu l’as compris maintenant. Mais l’autre, elle s’marre — sérieux? Elle va s’manger un coup de tête, p’têtre qu’elle rira moins, c’te salope. "Bah oui, comme c’est pratique." Putain mais pourquoi on t’croit pas, quand tu dis qu’tu viens sauver quelqu’un ? Ok, t’as sûrement pas la tête de l’emploi. Les phalanges abîmées, la gueule de petit con qui t’colle à la peau, il est même pas difficile de deviner ton appartenance dans la société de Detroit ni même le quartier dans lequel tu vis. Mais putain d’merde, c’est la vérité pourtant, comment tu pourrais lui prouver? T’façon, t’as rien à lui prouver, à c’te folle. T’es venu pour ton business, elle est venue pour le sien, chacun s’mêle de son cul et ça suffit, point barre. Mais tu retiens pas l’insulte qui s’échappe de tes lippes à son encontre, la rage qui te gagne. Elle te retourne, s’énerve à son tour — genre, elle pouvait s’énerver davantage? — te tord le dos contre le comptoir. "JE T’AI DIT DE PAS M’PARLER COMME ÇA." Silence, tu t’retiens de rire — parce que bon, t’prendre des coups francs, ça va deux minutes, c’est lassant. Elle finit par abandonner, te redresser. Cool, c’pas trop tôt pour qu’elle se calme. "Vale Superman." T’apprécies le surnom, même s’il est ironique dans ce contexte. Et que t’es loin d’être Superman, t’es plutôt le vilain toi. Pas aussi taré qu’le Joker, mais quand même. "Comme tu l’vois, la situation est parfaitement sous contrôle. Et on a certainement pas besoin de toi." Batte contre ta cage thoracique, distance de sécurité qu’elle instaure. Comme si elle-même se retenait de te frapper. Encore. "Alors dégage de là. Me remercie pas, t’inquiètes." Et là, tu ris. "Te remercier pour quoi? La cicatrice que tu vas laisser sur ma belle gueule? Nan t’inquiète, j’y comptais pas. Maintenant, t’es venue avec un but — moi aussi. Et t’as pas l’air d’abandonner ton objectif en cours de route. Faut croire qu’on est plus similaire que c’que tu voudrais admettre. Moi non plus, j’abandonne pas une mission en cours. J’ai une fille à retrouver, les raisons te regardent pas, j’te dois absolument rien. P’têtre que ton squad apprécie frapper sur tout ce qui bouge, pendant c’temps là, y’a des issues de secours qui ont déjà été prises par des gros dégueulasses qui font du trafic avec ces meufs, et crois-moi qu’ils ont déjà du réussir à en emporter un tas. Alors j’vais monter pour vérifier les pièces une par une plutôt que d’m’acharner sur les personnes qui ont l’même objectif que moi. Et t’as pas intérêt à m’en empêcher parce que jusque là, j’ai été gentil avec toi, mais touche moi encore une fois et j’peux te jurer que je t’éclate la gueule. Pigé?" Yeux dans les yeux, combat de Titans. Et tu fais valser sa batte d’un revers de manche pour t’en dégager et t’éloigner pour grimper les escaliers qui mènent aux chambres. Non sans cracher du sang sur le chemin. Parce que mine de rien, elle t’a bien déglingué, cette tarée.

Tu t’es fait malmené par une meuf — déjà ça, ça t’casse les couilles. Si en plus tu penses à la plaie sur ton arcade, tu déplores la cicatrice que ça va t’laisser — rappel constant de cette entrevue avec la Latina dont tu connais même pas l’prénom. L’pire dans tout ça, c’est qu’elle t’a fracassé pour que dalle — pour une haine aveugle et mal placée, parce que putain, t’étais pas l’ennemi, ce soir. T’étais pour une fois le partisan. Et tu t’dis que si elle avait su écouter, si elle avait pris ne serait-ce que deux minutes pour t’écouter, t’aurais pu l’aider. T’aurais pu l’épauler, lui offrir un soutien supplémentaire dans sa quête. T’aurais pu devenir son allié l’temps d’une soirée. Parce que tu soutiens pas c’bordel dans lequel vous êtes. T’es pas féministe — tu vas pas faire genre, t’es pas hypocrite — mais c’qui s’passe dans cette maison, c’est clairement hors limites. Et pendant qu’vous deux vous vous prenez la tête comme des gamins têtus, y’a d’jà des dizaines de pervers qui ont pris la fuite avec leur bombasse du jour. Alors ça finit sur des menaces. Parce que t’as perdu patience, là. Et qu’si elle te fout un autre coup, cette fois, tu répliqueras, et tu rigoleras pas avec elle. Pour appuyer tes propos, t’envoies sa batte valser et tu t’éloignes pour vaquer à tes occupations initiales.

"EH ! EH COÑO !" Putain mais — "Quoi encore?" Ça y est, elle fait une fixette sur toi? Pendant c’temps là, tu lui accordes pas un regard, tu procèdes à ouvrir les portes des nombreuses chambres à la volée, une par une. "J’crois que t’as toujours pas compris ce qui se passe-là. On est pas du même côté, et on a pas le même objectif, comprendo ? On a pas besoin de vous, et on veut pas que vous nous sauviez. On veut pas de votre putain d’hormone du super-héros qui va te faire bander trois nuits de suite parce que tu penses avoir pu sauver la princesse ok ?" Ton visage s’déforme en une grimace d’incompréhension. "Mais 'vous', qui? J’suis en solo là. J’appartiens à personne moi, j’fais parti d’aucun groupe. T’as l’mauvais gars. J’ai pas l’syndrome du super-héros ou j’sais pas quoi, j’la connais même pas la meuf que j’cherche si tu veux tout savoir, alors nan j’la cherche pas pour m’faire bander, ça m’intéresse même pas." Mais putain, elle continue d’parler sans t’écouter, encore et encore. "C’est fou ça, d’être un aussi gros emmerdeur incapable de comprendre que personne t’a rien demandé et…" Et elle se stoppe dans son élan et t’as à peine le temps d’voir le mobilier voler dans sa direction et la frapper de plein fouet.

C’est le karma, bitch.

Elle s’fait soudainement attaquer par un gros porc au ventre qui pend en caleçon, tu mates la scène de loin quand elle te gueule encore dessus. "EH BOUFFON, LA FILLE !" Tu arques un sourcil. "Ah parce que t’as b’soin d’mon aide maintenant?" Qu’tu siffles, en restant immobile pendant quelques secondes. Puis finalement, tu vas quand même dans la piaule, en tires la fille terrorisée jusqu’au couloir. "C’est bon tranquille j’suis pas là pour t’faire de mal. Tu vois les meufs en bas là?" Tu pointes du doigt le hall d’entrée, un étage plus bas. "T’y vas en courant et tu leur dis qu’c’est une de leur potes qui t’envoie. Ok?" Et quand elle acquiesce, tu hoches la tête à ton tour et la lâches pour qu’elle puisse rejoindre les autres comme tu lui as dit d’faire. Saine et sauve.

Et puis quand tu t’retournes vers ta compagnie du soir, tu la vois qui s’fait laminer par le gars vénère. Coup sur coup, elle paraît sonnée, elle peine à répliquer. Tu t’penches pour attraper sa batte qui avait volé plus loin et tu la gardes dans tes mains. "T’sais qu’si t’as b’soin d’un coup d’main, t’as qu’à demander…" qu’tu dis, l’air de rien, en haussant les épaules et en faisant tourner sa batte entre tes doigts. Bon, tu la laisserais pas crever t’façon, mais elle a quand même plutôt l’air mal en poing là, pendant qu’toi tu te tournes les pouces. Mais faut pas rêver, tu vas pas la tirer d’cette situation après tout l’blabla qu’elle t’a fait sur ‘j’ai pas besoin de toi’ sans qu’elle te le demande. Et c’est même pas pour ton égo ou pour des envies de jouer le héros. C’est juste pour qu’elle reconnaisse un minimum qu’t’es pas son ennemi. Pas ce soir, en tout cas.


hj: désolée pour le délai

Marre de t’justifier, tu te barres à l’étage pour faire ce pour quoi t’étais venu ici à l’origine. Chercher la meuf que toi et Nino avez vu se faire kidnapper. Paranoïa accrue depuis c’jour là. Faut dire que putain, la nana, elle ressemblait fortement à Athéna. Ça pourrait être elle. Dieu merci qu’ça l’était pas. Toujours est-il qu’tu t’es mis en tête de la sortir de là, et tu comptes pas déroger à ce plan.

Sauf que l’étage, c’est pas forcément plus calme qu’en bas.
Y’a un taré qui s’met à sauter sur la latina qui t’avait encore suivi jusque là. Il la cogne, encore et encore. Et toi, ouais, ok, t’obéis à la requête qu’elle te crache entre deux bouchées de sang d’aller sortir la meuf que tu connais ni d’Eve ni d’Adam de sa prison. Tu lui donnes quelques directions, la fais sortir de là. Et puis tu t’retournes pour mater la brune qui git sur le sol, coups à foison.
T’attrapes son arme qu’tu fais tourner entre tes doigts. Tu la nargues, tu la provoques. Et sa réaction n’se fait pas attendre. "Va crever." Alors tu ricanes un peu, gardes le sourire aux lèvres. Ouais, vous êtes pareils, elle et toi. Fierté exacerbée. "Lâche ça." T’aurais bien aimé dire qu’elle a dit ça en s’débattant, mais la pauvre, tout c’qu’elle semble faire, c’est subir. Coup après coup. Le sang qui tache le sol. Mais toujours trop entêtée pour te demander de l’aide.
Pourtant, tu refuserais pas de lui la donner. C’même pas une question d’égo ou de syndrome du héros, c’juste qu’tu vois qu’elle est en galère — et puis, tu refuses jamais de cogner du connard. De cogner qui qu’ce soit, d’ailleurs, pour être honnête.
T’as l’impression d’assister à un match de boxe, la brune peine à s’relever mais elle le fait quand même, tu reprends p’têtre un peu espoir qu’elle gagne la bataille. Surtout quand elle continue d’se la raconter. "J’ai pas b’soin d’toi." Mais est-ce qu’elle essaye de te convaincre, toi? Ou de se convaincre elle-même? Tu penches pour la deuxième option, ouais. Et ça t’aurait presque fait rire. Presque.
Si l’gars l’avait pas envoyée valser comme une poupée de chiffon contre le mur. Si elle avait encore les yeux ouverts et son sourire narquois. Ouais, non, parce que là, elle est ko. Littéralement. Elle bouge plus. Réagit plus. Et toi? Toi, Ares? Tu roules les yeux un mini quart de seconde. Première réaction face à la scène. Elle a refusé ton aide par fierté et voilà où ça l’a menée. Mais t’faut pas plus d’un quart de seconde pour décider d’bondir sur le type. Batte lachée — c’pas ton arme de prédilection, à toi. Poing américain rapidement enfilé — l’habitude — tu n’hésites pas à frapper. Encore, et encore, et encore. L’arcade qui saigne, le nez qui pète, la mâchoire qui craque et se déboite. Encore et encore, jusqu’à c’que le type tombe raide. Et ouais, tu t’en aies pris aussi dans l’lot, évidemment. Mais il termine plus amoché qu’toi. L’habitude d’avoir affaire à de gros bras.

Finalement, c’est vers la Latina qu’tu t’tournes.
Tu passes tes bras en-dessous de ses aisselles pour tirer son poids à l’intérieur de la chambre que vous venez de libérer. Puis tu la portes et la cales dans le lit, avant de t’éloigner en prenant soin d’refermer la porte derrière toi. Elle a été bien amochée, elle doit en avoir pour un moment à reprendre ses esprits.

En attendant, tu visites les chambres, une par une. Envoies les filles au rez-de-chaussée retrouver le squad des Super Nanas, casse les mâchoires des types que tu peux croiser sur le chemin — même si en réalité, la plupart se sont barrés dès les premiers coups de fumée. Et une fois qu’le tour a été fait, tu pestes un peu — tu l’as pas retrouvée. La nana qu’t’étais venu chercher. Elle était pas là, p’têtre qu’elle s’est faite embarquer dans les premières au lancement de l’assaut.

Frustré, dépité, tu finis par retourner dans la chambre où t’as laissé la brune comater. Elle est toujours out, alors tu t’contentes de t’asseoir sur une chaise non loin du lit — mais tout d’même à une distance raisonnable — et tu t’allumes un joint. Ouais, parce que tu peux être très con Ares, mais tu vas certainement pas la laisser seule alors qu’elle est presque raide morte. Même pas en rêve.