bullshit. (jjay)

Alors elle, elle va m'entendre.

Je conduis comme une furie jusqu'à la maison, les mains qui tremblent de colère sur le volant, je ne fais même plus gaffe à ce qui m'entoure et j'imagine que c'est un miracle que j'arrive devant notre maison en un seul morceau. Les pneus crissent sur le bitume et laissent une trainée noire derrière eux alors que je freine comme un malade au frein à main, l'arrière de la voiture part de travers et je me retrouve avec une voiture à moitié au milieu de la route. J'estime qu'il y a suffisamment peu de passage dans le coin - pour ne pas dire aucun - pour me permettre de la laisser là pour le moment. Je sors et claque la portière, je fais trois pas, m'arrête, fais demi-tour et reviens sur la portière que j'ouvre et ferme comme un malade six foi d'affilée - histoire de me défouler un peu avant d'entrer. Je donne même un coup de pied dans la tôle avant de me diriger enfin vers la porte.

J'entre en trombes et gueule immédiatement. — MEADBH ! Je ne me souviens même plus de la dernière fois que je l'ai appelée comme ça. Mais visiblement, elle y tient à ce prénom puisqu'elle l'a tatoué sur le ventre de Seven. Je suis franchement curieux de connaître sa justification - non en réalité pas du tout, je sais à 100% que ça va m'énerver encore plus, quoi qu'elle dise. Encore pire si elle esquive.

Je fais le tour des pièces du bas : personne. Je monte à l'étage, fonce dans sa chambre : personne. — BORDEL MEADBH ! Que je répète, n'ayant même pas pensé au fait qu'elle puisse ne pas être là. Par chance, une fois s'élève de la salle-de-bain : la sienne. Je fonce, ouvre la porte comme un sauvage, à tel point que la poignée déjà à moitié flottante termine dans ma main. Je la balance à travers la pièce et m'approche de May. Je lui empoigne violemment le haut du bras et la force à me regarder. Puis, je me mets à la secouer comme un excité : — POURQUOI SEVEN A TON PRÉNOM TATOUÉ SUR LE VENTRE ?! J'ai envie de tout casser.

Tu ne pensais à rien alors que tu avais traîné beaucoup plus de temps que nécessaire sous la douche, vidant allègrement votre ballon d’eau chaude sans la moindre pensée pour les autres. De toute manière, ce n’était pas comme s’ils se battaient pour y aller et puis au pire, un peu d’eau froide n’allait pas les tuer. Bref, tu en avais profité qu’il n’y ait personne pour abuser.
En débardeur-petite culotte, tu terminais d’inspecter tes sourcils, la pince à épiler en main, quand l’ouragan s’abattit sur la maison. JJ qui était entré comme un sauvage dans la maison et qui hurlait. En soi, ça n’avait pas de quoi te faire sourciller, JJ était souvent furieux et il gueulait souvent aussi. Ce qui ne faisait jamais en revanche, c’était de rentrer en hurlant ton prénom. Le prénom complet. Là par contre, ça sentait déjà moins bon et tu pinçais des lèvres en essayant de faire le point sur ce qui aurait pu le rendre furieux. La liste te parut soudain assez longue, même si pour la plupart, il y avait prescription selon toi.
Inspirant profondément en puisant dans ton courage, tu l’appelais d’un « J’suis là » un poil trop fluet. Et par reflexe, tu gardais bien fermement ta pince à épiler entre tes doigts repliés. JJ ne tarda pas à faire son apparition, à moitié fou à arracher la poignée et la jeter à travers la salle de bain pour aller briser en mille morceaux ta glace. Sept ans de malheur. Putain. Ouvrant la bouche pour réclamer, il ne t’en laissa pas le temps, t’empoignant le bras pour te secouer comme un prunier « ARRÊTE CA ! » gueulais-tu pour qu’il cesse jusqu’à ce que le reproche tombe. S’il avait cessé de te secouer, tu aurais peut-être eu le temps de réfléchir, mais là, ta cervelle faisait ping-pong dans ta caboche. « Parce que je l’ai fait ! »

Elle me gueule d'arrêter. Du coup, je la secoue encore plus fort, j'aime pas qu'on me dise quoi faire. — Parce que je l’ai fait ! Quoi ? Sa réponse elle par contre, a le mérite de me stopper. Je ne la lâche pas pour autant, elle serait capable de filer. Des points d'interrogations se dessinent dans mes yeux clairs alors que sa réponse me paraît totalement absurde. Comment ça "parce que je l'ai fait" ? Mais merde, c'est tout sauf une réponse ça ! Je vois rouge et grince des dents, j'ai d'ailleurs toujours les yeux complètement rouges et explosés à cause des graviers que j'ai pris dedans, enfoiré de Seven de merde. — Commence pas à jouer avec mes nerfs, ILS SONT DEJA A BOUT ! Que je lui hurle dessus, ma main autour de son bras qui semble continuer à serrer de plus en plus fort. Je me fiche bien que ça lui fasse mal, moi, ça m'aide à me canaliser pour éviter de me transformer en tornade dans la pièce. — Répond à ma putain de question, OU JE VAIS PETER UN CÂBLE ! J'veux dire, encore plus que maintenant quoi.

Tu le sais pourtant que JJ n’écoute rien, t’as dit d’arrêter, il y va encore plus fort ! C’était un peu de ta faute parce que tu avais réagi sans réfléchir, mais en même temps tu ne savais pas à quoi t’attendre, toi ! Heureusement, il était trop énervé pour tourner autour du pot. Toi en revanche, c’était une autre histoire. Du moins, à tes yeux non, tu répondais à sa question : il avait ton nom de tatoué parce que tu l’avais tatoué. Voilà. Le truc, c’est que JJ n’était pas d’humeur à jouer avec les mots alors tu profitais du moment où il cessa de te secouer pour mieux te camper sur tes pieds, histoire de mieux appréhender un coup ou une connerie dans ce genre-là. T’avais fini par apprendre à encaisser. Ses doigts autour de ton bras te font mal, mais tu sais que tu n’as aucune chance de te libérer de son emprise, de vous deux il était le plus fou. « Mais c’et bon JJ ! C’était pour le troller ! » tu siffle entre tes dents et fronces des sourcils, l’air renfrognée. « Qu’est-ce que t’es allé imaginer, putain ? On parle de Popescu là ! » T’en rajoutais un peu, mais tu te savais crédible, tu mentais aussi naturellement que tu respirais et tu étais passée maître en matière de non-dits.

— Mais c’est bon JJ ! C’était pour le troller ! Pour le troller ? Depuis quand leur relation faisait qu'elle pouvait le troller ? Depuis quand ils se parlaient déjà en fait ? J'suis toujours pas satisfait de la réponse, c'est même encore pire, parce que je me pose encore plus de questions. — Qu’est-ce que t’es allé imaginer, putain ? On parle de Popescu là ! Justement bordel ! Je sais de quoi il est capable ce con et l'idée qu'elle ait pu être aussi proche de lui, au point de lui tatouer un truc sur la peau, putain, ça me rend malade. Je lâche son bras, mais ce n'est pas pour la libérer. Mes deux mains viennent s'écraser contre ses joues, retenant son visage prisonnier de mes paumes rugueuses. Je me rapproche d'elle et la toise, très sérieux. — Je veux savoir où, quand, comment, pourquoi. JE VEUX TOUT SAVOIR ! Et vite. Parce que là, ma patience est vraiment à bout. Je bouillonne, ne lui laisse même pas le temps de réponse et enchaine déjà, ne parvenant pas à me calmer. — Pourquoi tu parles à ce type !? J'VEUX PAS QU'TU LUI PARLES ! J'peux pas vraiment lui expliquer pourquoi et je sais qu'elle n'obéit jamais à rien, mais du coup, ça ne fait qu'alimenter encore plus mon état déjà déplorable. Putain de vidéo de merde, sans ça, j'aurais pu crever Seven tout à l'heure et le problème aurait été résolu. Je regretterais presque.

Normalement, selon tes calculs, tes réponses auraient dû le calmer direct. Dommage qu’il n’y avait qu’en calcul mental que tu visais juste parce que loin de le calmer, JJ semblait encore plus fébrile qu’avant. Tu ne voyais vraiment pas pourquoi. Par jalousie ? C’est ce que tu t’imaginais, naïve que tu étais. Et puis, si c’était par jalousie, c’est qu’il tenait à toi, non ? Tu aimais penser que oui.
Enfin, il finit par te lâcher et par reflexe, tu te frottais le bras endolori non sans ouvrir ton poing. Si tu pensais être débarassée de lui, il te prouva assez vite le contraire, attrapant ton visage entre ses mains. Pas de manière tendre, tu ne tentais pourtant rien pour te dégager. Non, tu ne pouvais pas aller à la confrontation, pas quand il était dans cet état. Pas plus que tu ne pouvais lui raconter toute l’histoire comme il te le réclamait. « C’est arrivé ici ! Un soir où j’étais seule à la maison, sa bagnole est tombée en rade juste devant chez nous et il m’a vue à la fenêtre. Il a peté un câble genre il a défoncé la porte et tout ! » faux, tu lui avais ouvert. Parce que tu étais un peu conne, mais surtout parce que tu étais en colère contre les Kids et que Seven était ton seul lien avec Savannah. « Il m’a cassé les doigts » après que tu lui ais planté un couteau dans la main « Je sais pas ce qu’il avait en tête mais quand il m’a relâché, je lui ai mis un coup de taser et quand il a été par terre, j’ai eu envie de taper fort ! » il t’avait brûlé la fesse, tu lui avais tatoué ton nom. « Je lui parle pas ! » Un peu quand même. « C’est bon ? Lâche moi maintenant s’te plait ! »

— C’est arrivé ici ! Un soir où j’étais seule à la maison, sa bagnole est tombée en rade juste devant chez nous et il m’a vue à la fenêtre. Il a peté un câble genre il a défoncé la porte et tout ! Quoi ? — Il m’a cassé les doigts. QUOI ? Mes yeux glissent aussitôt, à la recherche de ses doigts. Je, vais, le, tuer. — Je sais pas ce qu’il avait en tête mais quand il m’a relâché, je lui ai mis un coup de taser et quand il a été par terre, j’ai eu envie de taper fort ! Putain de bordel de merde. Ça commence à faire beaucoup d'informations et tout ça n'a aucun sens.  — Je lui parle pas ! Ouais, bah vaudrait mieux. Elle râle et me demande de la lâcher, je finis par obtempérer. Je reste planté devant elle quelques instants, totalement immobile. Puis je me mets lentement à trembler de rage et j'explose subitement. J'attrape le premier truc qui me passe sous la main : le rideau de douche. Je tire dessus comme un forcené, la tringle se décroche dans un boucan pas possible et je m'acharne sur le tissu avant de le jeter à terre. Je renverse tout ce qui me passe sous la main, tout ce qui traine sur la baignoire, sur le rebord du lavabo. Une douleur vive me poigne l'estomac, mais je n'y prête pas attention, ne réalisant pas que c'est ma blessure qui vient de se rouvrir à cause de mes mouvements trop brusques. Je me mets à taper dans ce qu'il reste du miroir pour tout faire tomber, me coupant les doigts à de multiples endroits. — JE VAIS LE BRÛLER CET ENFOIRÉ ! Je suis complètement en transe, fou de colère à cause de ce qu'elle vient de me dire. Comment a-t-il osé ? Pénétrer chez nous, s'en prendre à May alors qu'elle était seule ? Je vais le vider comme on vide les porcs. Je me retourne finalement vers May. — POURQUOI TU ME L'AS PAS DIT AVANT ? Je ne réfléchis plus à ce que je dis. — J'étais avec lui là, si j'avais su, JE L'AURAIS BUTÉ ! J'ai besoin d'un coupable, là tout de suite, et je n'ai pas Seven sous la main. Je reviens m'imposer devant May, hors de contrôle, une main qui agrippe son épaule brutalement. — Tu m'caches d'autres trucs ? RÉPOND ! Si je n'avais jamais vu le tatouage, elle ne me l'aurait probablement jamais dit, n'est-ce pas ? Alors j'étais en droit de m'interroger sur le fait qu'elle puisse me cacher d'autres choses encore.

Tu lui racontais ta version, omettant sans sourciller les petits détails futiles qui n’auraient fait qu’envenimer la situation. En gros, dans la version que tu lui donnais, Seven était coupable et toi tu n’étais qu’une blanche colombe, pauvre fille agressée chez elle alors qu’elle n’avait rien demandé. Et plus tu racontais, plus il montait en pression, faisant les grands yeux alors qu’il découvrait que son ennemi avait foulé votre parquet.
Enfin, il te relâcha le visage et tu resserrais enfin tes doigts de la pince qui commençait à t’écorcher la peau. Vous restiez quelques secondes sans bouger, à vous regarder dans le blanc des yeux quand soudain, il explosa. Pas contre toi. Et c’est tout ce que tu retins de tout ça. S’il avait voulu te frapper, il l’aurait fait. S’il avait voulu te traîner jusqu’à Seven pour qu’il confronte ta version à la sienne, il l’aurait fait. Tu soupirais imperceptiblement alors qu’il démontait ta salle de bain. Tu n’interviens pas davantage alors qu’il hurlait des menaces à l’encontre du roumain. Tant pis pour lui, dommages collatéraux.
Quand il revint à toi, tu te mordis l’intérieur des joues. « Parce que je peux gérer ça, je voulais gérer ça toute seule, comme une Kid » soufflais-tu en appuyant sur la corde sensible. La phrase suivante te fit pourtant tiquer là où tu auras du tiquer plus tôt déjà. « JJ, qu’est-ce que tu foutais avec lui ? Et comment t’as fait pour voir son ventre ? » tu le regardais intensément, essayant de comprendre, mais bien vite, il revint à la charge avec les questions compromettantes. Tu t’en mordis de plus belle la lèvres. C’était le moment. Le moment de tout dire, ou rien. Tu finis par soupirer avant de te retourner pour lui montrer la marque ronde sur ta fesse. « Ça a commencé quand t’étais en taule. Il m’était tombé dessus à une soirée et il m’a frappé et brûlée avec sa cigarette. » Tu te retournais pour lui faire face. « Après ça n’a été que pire en pire, mais je lui ai rendu tous les coups si tu veux tout savoir. Je lui ai même planté un couteau dans la main, je crois que ça s’est infecté et j’ai été bien contente. » racontais-tu avant de reposer ton regard dans le sien. « Tu voulais que je fasse quoi pendant que vous étiez tous loin ? »

— Parce que je peux gérer ça, je voulais gérer ça toute seule, comme une Kid. Je me calme un peu, juste un peu, interpellé par sa réponse. Une partie de moi, la plus énervée, à envie de lui dire que visiblement ce n'est pas réussite, mais je ne sais quel miracle, je me tais. Probablement parce qu'elle m'a eu par surprise et que ça me laisse muet. — JJ, qu’est-ce que tu foutais avec lui ? Et comment t’as fait pour voir son ventre ? Merde. Je ne l'avais pas anticipée celle-là non plus. Mon silence dure un peu trop longtemps, mais j'ai du mal à rassembler mes idées. La douleur dans mon ventre commence à m'envahir et il devient difficile de l'ignorer, ce qui m'embrouille encore plus. Je fronce les sourcils, à la recherche d'un mensonge bref et crédible. Je finis par lâcher le plus simple, j'suis de toute façon pas douer pour inventer des trucs. Et puis après je m'y perds. — Rien. Le hasard. On s'est battus, voilà tout ! Ce n'est pas totalement un mensonge, on s'est bel et bien affrontés, sauf que ce n'est pas pendant le combat que j'ai vu son ventre. Un détail, ce n'est qu'un détail. Et puis de toute façon, c'est moi qui pose les questions. Elle se retourne et je la regarde faire, intrigué. Elle me dévoile une cicatrice de brûlure sur la fesse et je ne suis pas bien sûr de comprendre. Je relève les yeux vers elle, le regard chargé de questions. Et là, elle m'explique tout. Découvrir que ça fait un moment que ça dure me contrarie énormément. Genre, vraiment, beaucoup. Je serre les poings. Et ce que je retenais quelques instants auparavant finit par sortir tout seul, sans le moindre filtre. — Et tu crois toujours que t'es capable de gérer ça toute seule, HEIN ?! J'inspire profondément et pivote brusquement avant de venir de cogner contre la porte. D'abord un coup de pied. Puis deux. Puis ce sont mes poings qui s'abattent dessus, déferlante enragée. Faut que j'évacue, je crois que j'ai accumulé trop de choses dernièrement. La mort de Don me travaille encore bien trop même si je feins de vivre parfaitement bien avec au quotidien. Je remets des coups de pieds, des coups de poings, le bois craque, la porte se déforme progressivement, le vieux bois humide et rongé par les mythes est bien trop abimé pour résister plus que ça. La porte finit trouée et de travers, et moi j'ai les mains déchirées par les échardes. Mais ça a le mérite de me calmer un peu. Je me tourne et viens m'appuyer contre le mur le plus proche, haletant. — Tu peux pas rivaliser avec 7, arrête d'être conne. J'vais m'charger de ça. Je me redresse, fâché. — Et toi, le cherche pas ! Contente toi d'essayer de rester entière, ça devrait déjà pas mal t'occuper. J'ai pas le temps de tout gérer, j'peux pas être de partout à la fois. Si May devient une source de préoccupation aussi, je vais finir par imploser. Depuis quand elle plante et tase des gens exactement ?

Tu ne savais pas trop s’il se calmait parce qu’il se calmait pour de vrai, ou si ce n’était que pour exploser de plus belle. Il était difficile à déchiffrer, tu te donnais pourtant du mal pour le comprendre. Essayer d’appréhender ses réactions et trouver les bonnes réponses. Tu ne cillais pas quand il répondit s’être battu avec Seven, tu n’avais aucune raison de douter de lui. Ce mec ne savait faire que ça de toute manière.
Tu finis alors par tout lui dire. Presque tout. Ta version quoi, tu skippais quelques détails encore, mais ça, il n’en saura rien et tu ne pensais pas que Seven irait lui dire le reste. Alors tu haussais simplement des épaules. « J’suis toujours sur pieds, lui est handicapé de la main et a le nom d’un Kid tatoué sur le bide, j’trouve que le point me revient ! » OK, fierté mal placée, tu te considérais comme égale. JJ n’écoutait pourtant plus du tout, s’excitant soudain et sans raison contre la porte. Tu soufflais, contrariée de perdre le dernier rempart de l’intimité, mais pas fâchée qu’il préfère frapper la porte que toi. Il finit par se retourner et tu remarques alors la tâche de sang sur son abdomen. Merde, c’était Seven qui lui avait fait ça ? Tu t’approchais de lui pour soulever son t-shirt et découvrir la plaie.
Horrifiée, tu relevais le nez vers lui. « C’est lui qui t’a fait ça ? » si c’était le cas, il méritait que tu laisses JJ s’occuper de son cas ! Histoire de t’assurer que sa colère soit définitivement tournée loin de toi, tu viens poser ton front contre son torse. « Je t’ai rien dit parce que je savais que tu voudrais le tuer, mais je veux pas que tu retournes en prison… » puis te reculant, tu lui offris un sourire. « J’ai pris une photo, tu veux voir ? »

— J’suis toujours sur pieds, lui est handicapé de la main et a le nom d’un Kid tatoué sur le bide, j’trouve que le point me revient ! Je dois avouer qu'elle s'est quand même bien défendue, mais ça ne suffit pas à me faire passer l'éponge. — Ce mec est un cafard, il crèvera jamais et reviendra toujours se venger, tu verras ! Un jour, tu s'ras plus sur pied comme tu dis. Ce qu'elle ne sait pas, c'est qu'elle profite actuellement d'une certaine immunité, mais je vais bien me garder de lui préciser quoi que ce soit. — Et t'es pas indemne non plus. Le corps marqué, les doigts cassés, ce n'est pas fou non plus.

J'évacue une dernière fois ce qu'il me reste de colère et quand je me retourne, je tombe nez à nez avec le visage stupéfait de May. Quoi ? Ce n'est pourtant pas la première fois qu'elle me voit défoncer des trucs. Elle se jette sur moi et j'esquisse un mouvement de recul par réflexe. Elle soulève mon t-shirt et je ne comprends pas immédiatement. Jusqu'à ce que mes yeux rencontrent le sang sur le t-shirt. Fait chier. — C’est lui qui t’a fait ça ? J'éclate de rire mais cesse aussitôt, parce que ça me fait trop mal. Je grimace et je grogne, tirant sur mon t-shirt pour qu'elle le lâche et qu'il revienne cacher la plaie. — C'est ça ouais, et puis quoi encore ? S'il m'avait fait ça, il s'rait déjà six pieds sous terre, j'te l'garantis. Je n'épilogue pas sur le sujet, n'ayant pas vraiment envie d'expliquer l'origine de la blessure.

Elle vient finalement poser son front contre mon torse et ça me calme aussitôt. Je souffle un peu, fatigué par l'enchainement de tous les évènements et par mes émotions qui font les montagnes russes. — Je t’ai rien dit parce que je savais que tu voudrais le tuer, mais je veux pas que tu retournes en prison… Je me radoucis et viens finalement l'entourer de mes bras. Je viens déposer un baiser sur son crâne avant de murmurer dans ses cheveux. — T'inquiètes, j'y retournerais jamais. J'suis sûr que personne ne déclarerait sa disparition de toute façon. Personne le chercherait ce gros con.

— J’ai pris une photo, tu veux voir ? J'hésite un peu, ne sachant pas vraiment si ça va me faire rire ou m'énerver de nouveau. J'ouvre la bouche mais m'interrompt brutalement alors que des connexions se font. Je la relâche aussitôt. — Attend, attend... Mon visage se froisse alors que l'orage semble repointer le bout de son nez dans le fond de mes prunelles. — Comment ça s'fait que Seven ait réussi à te cramer la fesse ? LA FESSE ! C'est quoi cette arnaque putain ?

Oui, Seven était un cafard, mais par moment tu te disais que toi aussi, tu avais fini par le devenir. Il était réputé increvable, mais jusqu’à preuve du contraire, tu t’en étais relevée. Ceci dit, tu craignais un peu sa vengeance, même si tu ne l’avouerais jamais. « Je sais » soufflais-tu de mauvaise foi, ce que tu n’avouais pas, c’est que ça te plaisait bien ce jeu de vilains. A croire que t’avais pris goût à cette peur mêlée à l’adrénaline. Les blessures ne faisaient jamais mal que les premières semaines, ensuite tu en tirais une certaine fierté, ou nonchalance.
Cette même désinvolture que tu affichais devant la colère mal-contenue par JJ qui s’excitait contre la morte en bois. Tu le laissais faire, ce n’était que du matériel, rien que tu regretterais. La tâche sombre sur son pull eut davantage de quoi te rendre perplexe, puis inquiète. Dans la folie qui l’habitait, tu ne pouvais t’imaginer qu’il soit blessé à son tour. Son petit rire et son explication ne te rassuraient qu’à moitié, mais tu ne songeais pas à te demander qui avait pu lui faire ça.
Parfois il ne valait mieux pas savoir, alors tu tentais de le calmer par la seule manière que tu connaissais : en jouant avec ses émotions. Et ça marche, tu le sens se radoucir et tu viens poser la main sur la pointe de sa hanche. « J’espère ».
Puis, comme prise d’une inspiration, tu lui proposais de voir ton œuvre à son origine. T’étais même prête à chercher ton portable quand la lueur noire revint voiler son regard. Tu levais le nez vers lui en arquant les sourcils. « Parce que c’était en été et qu’il m’a désapé le salaud ! » tu racontais ça avec naturel, comme si tout ça n’était que routine. Tu devinais alors la suite. « A part me frapper et me cramer, il a rien fait, si c’est ce que tu veux savoir. » Et c’était bien pour ça que tu doutais de sa culpabilité quant au viol d’Assia. S’il l’avait fait une fois, il l’aurait refait une deuxième fois. Rien que pour prouver aux Kids qu’il pouvait s’attaquer à vous.

— Parce que c’était en été et qu’il m’a désapé le salaud ! Ok, woh. Pardon ? Je suis déjà prêt à repartir de la maison, retrouver Seven et finir ce que j'avais commencé. Mais May semble lire dans mes pensées et anticipe la suite. — A part me frapper et me cramer, il a rien fait, si c’est ce que tu veux savoir. Je reste stoïque quelques instants avant de finalement craquer un peu, les nerfs en feu. Je me mets à rire nerveusement, puis viens passer mes mains sur mon visage. Je ris de plus en plus fort, lessivé. Qu'est-ce que je vais découvrir encore ? Seven dépoile ma meuf, la frappe, lui casse les doigts, lui brûle la fesse, c'est quoi la suite, hein ? Y a eu quoi d'autre exactement ? Je finis par laisser retomber mes mains et mon crâne se pose sur le mur derrière moi. — T'en as d'autres des bonnes nouvelles comme ça ou t'as terminé cette fois ? Je souffle par le nez, excédé. J'ai trop hurlé et trop frappé, je me suis vidé de mon énergie. — Putain, ça m'gonfle ces conneries. Ouais, leur petit jeu me déplaît vraiment et j'hésiterai pas à y fourrer mon nez si nécessaire histoire d'y mettre un terme. Je refuse qu'ils continuent, je refuse qu'ils se voient si j'suis pas là. J'ai pas confiance, ni en l'un, ni en l'autre. J'attrape ses poignets et les remonte vers moi pour inspecter ses mains. — C'est quels doigts ? Et puis j'enchaine. — La prochaine fois qu'tu l'vois, tu m'appelles et tu restes à distance ok ? J'vais lui faire passer l'envie d's'en prendre à toi à ce fils de pute. Je grommèle tout bas. — T'es à moi, personne ne touche. Pour faire du bien ou faire du mal, y a que moi qui dispose de ce droit. Un pass illimité que je me suis moi-même octroyé. Mes yeux dévient sur mes mains charcutées et je fais la moue. — Putain. Aide-moi à nettoyer ça, trop relou à faire tout seul. Trop relou à faire tout court et en plus j'sais même pas avec quoi enlever les échardes.

C’était un peu ton truc, de raconter les choses avec ce ton neutre, comme si de rien n’était. Comme si tu n’en avais pas souffert, comme si tu n’avais pas réellement craint pour ta vie ces fois-là. Le problème, c’est que tu oubliais vite. A présent, JJ savait à peu près l’essentiel et devant son rire nerveux, tu restais immobile, t’attendant au pire. Ses rires n’annonçaient pas toujours une bonne chose. « Je pense que c’est tout » Là tout de suite, rien d’autre ne te venait en tout cas alors tu haussais de l’épaule avant de pincer des lèvres sur le côté, attendant d’être sûre que la crise soit passée.
Le laissant faire, tu lui montrais ta main droite aux doigts guéris, mais peut-être un peu moins droits qu’auparavant. Dans ton malheur, tu avais eu de la chance : Seven ignorait que tu étais gauchère. Puis comme une enfant prise en faute, tu hochais du menton. « D’accord, je te préviendrais » Ou pas, tu aviserais, mais c’était une bonne chose de le savoir prêt à surgir pour te sauver. Tu n’aurais pas toujours un Knox ou un Samih sous la main, un JJ en plus pour sauver tes miches ne serait pas de trop. Sa précision te fit sourire et cette fois, tu ne te fis pas prier pour aller récupérer ta pince à épiler et le mener au bord de la baignoire, histoire qu’il soit stable le temps que tu vérifies que ses mains soient intactes. « J’suis désolée de pas te l’avoir dit plus tôt » pas vraiment. « J’voulais pas t’inquiéter, c’est tout » racontais-tu en sortant un débris, concentrée sur sa main. « Tu crois qu’on pourrait prendre la porte de la salle de bain de Sam ? Il ne remarquera pas je pense »