comme si chaque bonheur devait être puni (mercury)

(cette partie est obligatoire, vous devez remplir au moins 7 anecdotes, mais vous pouvez en faire autant que vous voulez si vous êtes inspiré)

01_ça commence par une histoire d’amour, et il sait que tous n’ont pas cette chance. ça commence par deux gens qui s’aiment, emménagent ensemble, ont un enfant et l’aiment tout aussi fort, ça commence par deux personnes qui ont toujours fait de leur mieux et qu’il a toujours aimé plus que tout. deux personnes qu’il a abandonnées, déçues. qui lui manquent, si fort. 02_il a dix ans quand tout se casse la gueule, dix ans quand un ami proche de ses parents perd son travail et emménage chez eux pour quelques mois. dix ans quand l’autre se permet de le toucher quand ses parents ne sont pas là, mais c’est un secret, tu sais, il ne faut pas en parler c’est juste toi et moi, il ne faut pas en parler ils seraient déçus de toi tu ne veux pas ça, il ne faut pas en parler. alors il se tait. il se tait et ça le bouffe, et les notes chutent, mais il entre au collège et c’est peut-être normal peut-être que c’est juste le début de la crise d’adolescence ça lui passera sûrement, alors personne ne cherche vraiment à savoir. 03_il se fait des amis plus âgés, parce qu’il ne les supporte pas ceux de son âge et leurs vies enfantines et toute leur innocence, il se fait des amis plus âgés qui l’incitent à faire le mur, l’emmènent en soirée, et il a à peine douze ans quand il prend sa première cuite, à peine douze ans quand il commence à voir l’alcool comme l’échappatoire à ses problèmes. il a douze ans et ça le fait rire, planer, et tant pis pour les visages désespérés de ses parents, venus le chercher après quelques séjours à l’hôpital. 04_quatorze ans et plusieurs psys plus tard on l’envoie en désintox pour la première fois, son diagnostic de dépressif alcoolo-dépendant lui colle à la peau et il n’a pas envie d’essayer il n’a pas envie d’arrêter et il se moque des conséquences sur sa santé, mais sa mère pleure et le supplie d’essayer et il ne peut pas refuser, parce que ses parents sont la seule chose à encore pouvoir l’atteindre à travers toute la haine de lui et de la vie, et pour eux il veut essayer, pour regagner leur amour qu’il a perdu avec toutes ses conneries. 05_seize ans et il part de chez lui. il a essayé, plusieurs fois, il a essayé de se tenir à carreau de redevenir l’enfant modèle qu’il était mais la dépression le bouffe de l’intérieur. alors il part de chez lui, squatte chez des potes un peu louches, accompagne son alcool de quelques cachets, couche avec des dealers pour les récupérer gratuitement, couche avec n’importe qui en général, fait tatouer ses bras, dans une tentative de réappropriation du corps qu’on a sali, volé. il en fait ce qu’il veut, il choisit tout, et peut-être qu’il choisit mal, mais il choisit.06_il bouge, souvent, change de ville, d’état, traîne chez des potes, dans des squats. rencontre des gens cassés comme lui, qui finissent toujours par partir, lui laissant quelques jolis souvenirs dans les meilleurs des cas. trois fois par an, pour son anniversaire et pour les leurs, il écrit à ses parents. je vais bien, ne vous inquiétez pas. il ne donne jamais d’adresse retour, terrifié de ce qu’il pourrait lire dans une éventuelle réponse. il est lâche et il se hait, mais il ne peut pas faire face à leur peine, leur déception. et il se dit que comme ça, le jour où il ne leur enverra plus rien, ils comprendront, ne s’acharneront pas à le retrouver. 07_il arrive à détroit, et il se sent un peu chez lui. peut-être parce qu’il a de la chance et n’a jamais été confronté à ce que la ville a de pire, peut-être que c’est juste qu’il peut se laisser sombrer en paix, ici. il est chez lui, n’est jamais resté si longtemps dans une ville sans la féroce envie de fuir, à nouveau. il met ça sur le compte de son chat à trois pattes, petite créature maigrichonne ramassée dans la rue, qu’il ne peut décemment pas laisser derrière lui, mais il sait qu’il aime cette ville et, d’une façon curieuse, les gens qui y vivent. quelques-uns, du moins.